Monday, June 30, 2008

Le danger de dérailler

Ce vendredi 4 juillet, les Américains souligneront la fête de leur indépendance avec des célébrations partout à travers le pays. Quand on connaît le patriotisme américain, le moment était bien mal choisi pour diminuer les mérites militaires de John McCain. Cela n’a pas empêché Wesley Clark, un conseiller militaire de Barack Obama, d’y aller d’une déclaration qui a fait grincer des dents. En entrevue à l’émission « Face the Nation » de CBS hier, le général à la retraite a dit que John McCain n’est pas mieux qualifié pour être Président parce qu’il a piloté des avions pendant la guerre au Vietnam et qu’il a été fait prisonnier de guerre. Par esprit de justice, Clark avait toutefois précédé ses remarques en rappelant qu’il admirait McCain, respectait ses années de service militaire et le considérait comme un héros.

Mais le mal était fait. Survivre plus de cinq ans comme prisonnier de guerre au Vietnam est en soi un exploit qui montre une force de détermination peu commune. John McCain a été torturé à plusieurs reprises et on lui a cassé les bras si souvent qu’il est incapable de les lever au-dessus de ses épaules. Il est indéniable que l’expérience militaire du candidat Républicain est un atout auprès du public américain. Les derniers sondages indiquent que les électeurs font une plus grande confiance à John McCain qu'à son vis à vis démocrate sur les questions du terrorisme et de la sécurité nationale, et il est maintenant au coude à coude avec Obama pour ce qui est de gérer la crise en Iraq. Bien plus, discréditer l’expérience de McCain risque simplement de provoquer une comparaison avec Barack Obama dont le curriculum vitae est plutôt mince à cet égard. C’est d’ailleurs pour accroître sa crédibilité en politique étrangère que le Sénateur de l’Illinois entreprendra un voyage en Iraq (son deuxième), en Afghanistan et en Europe en août.

Le moment est particulièrement mal choisi puisqu’Obama doit redoubler d’efforts pour affirmer son patriotisme. Aujourd’hui, il porte l’épinglette du drapeau américain après avoir refusé de le faire pendant les primaires. Dans sa nouvelle annonce publicitaire, il parle de ses racines américaines, de son enfance vécue modestement et il répète son amour pour le pays plus d’une fois. La déclaration de Wesley Clark ne peut être que contre-productive pour la campagne d’Obama.

Ce faux pas force le candidat Démocrate à se distancier de ces propos malheureux(ce qu'il a fait dès ce matin). Ce qui est encore plus grave, cette erreur entraîne aussi les Américains dans un débat aussi mesquin qu'inutile et les éloigne des discussions qui s'imposent sur les enjeux internationaux importants. Déjà aujourd'hui, trois nouvelles attirent l'attention. D'abord ce matin, 162 milliards de dollars ont été autorisés par le Président Georges W. Bush pour entre autres, poursuivre les combats en Iraq et en Afghanistan. Quelle est cette nouvelle stratégie du Président en Afghanistan, quels sont les réactions et les propositions de McCain et Obama? Deuxième nouvelle : qu'arrive-t-il des intentions de capturer Osama Bin Laden ? Selon le NewYork Times, les militaires sur le terrain se disent prêt à agir mais le gouvernement américain prétend que ce n'est pas le moment. Enfin, on apprend dans le magazine le NewYorker aujourd'hui que le Président Bush a entrepris une opération secrète en Iran avec l'autorisation du Congrès. Est-ce vrai et qu'en est-il exactement ?

Les électeurs ont perdu confiance en Bush et ses acolytes. Ils s'attendent à ce que le prochain Président apporte des changements profonds, non seulement au niveau de l'approche mais aussi sur le plan des politiques. Les candidats à la succession ont le devoir de s'attaquer aux vrais problèmes de la nation et éviter de faire dérailler le débat. N'est-ce pas ce qu'Obama et son équipe promettent depuis le début de cette campagne ?

Catherine Cano- Canovision

1 comment:

Anonymous said...

On dirait que c'est maintenant le moment de la campagne ou les deux candidats sortent leur "duct-tape" et essaient de patcher les trous dans leur armure politique.

McCain essaie de renouer avec une base républicaine qu'il s'était antagonisé à plusieurs reprises avant de poser sa candidature pour avoir sa place sur le fauteuil le plus confortable du pays. Il essaie d'opérer un "virage vert" à la Dion pour courtiser cet électorat centriste ô-combien payant!

Pour moi et ce cynisme sélectif qui est le mien, le "double-talk" et la manipulation du discours était l'appanage des républicains, le volte-face de McCain ne m'a donc pas étonné, surtout considérant l'environnement politique post-apocalyptique laissé par l'administration Bush avec lequel il doit composer. Pour Obama, par contre, la chose me surprend. Ce n'est pas tant la correction de l'erreur de l'épinglette que ces virages à 180 degrés plus récents qu'on nous a servi cette semaine concernant sa position sur la peine capitale ou la FISA qui me surprennent.

L'homme avait déjà son auréole et les sondages lui concédaient déjà une avance substantielle - Pourquoi ce recentrer quand même et risquer cette image d'optimisme, de renouveau et de pureté politique qui est la sienne? Il est éloquent le monsieur, oui, mais va-t'il l'être assez pour jouer sur les deux tableaux en même temps?

J'aimerais bien savoir ce que vous en pensez. J'ai pour ma part la bizarre d'impression que les deux campagnes sont désormais en mode "défensif". Qu'ils fourbissent leur arsenal en vue de parer aux attaques éventuelles qui ne manqueront pas de pleuvoir suite au lancement de la véritable campagne.

J'ai l'impression que l'attaque de M.Clark (dont j'aime bien la carrière d'ailleurs sur la scène internationale) a agi en bon soldat à Face the Nation pour son favori, et qu'on aura amplement recours à des techniques similaires plus tard, mais que ce n'est tout simplement pas maintenant - Pourquoi vider son chargeur maintenant alors que la mémoire de l'électorat est si courte?

Pour ma part, je suis convaincu que le débat *va* effectivement dérailler et que la stratégie électorale va, tant pour le camp Obama que celui de McCain, comme pas mal tout le temps d'ailleurs, prendre le dessus sur les grands principes de justice et de transparence...

Ton billet laisse présager quelques rayons d'optimisme à cet égard. On gage? Je met un p'tit cinq dans le pot :)

O.