Monday, April 21, 2008

Hillary en eau trouble ?

Scranton, Pennsylvanie - J’en suis à mon troisième voyage en Pennsylvanie. En dehors de Pittsburgh et de Philadephie, c’est un coin de pays qui ressemble à certaines parties du Québec. Je tenais à sortir des grandes villes qui devraient favoriser Barack Obama. Quel paysage magnifique entre les montages, les lacs et les fermes laitières qui longent cette route de campagne !

Deux heures de conduite à écouter les talk show du coin et je suis en train de réaliser que cette course sera peut-être encore plus serrée que prévu. Hillary Clinton devait l’emporter haut la main il y a un mois. Elle mène encore, mais l’écart avec son adversaire est moindre. Pourtant, la Pennsylvanie est véritablement le pays d’Hillary. À chaque discours, elle rappelle qu’elle y a vécu une partie de son enfance et qu’elle y garde un attachement profond.

Je choisis donc de me rendre à Scranton, là où elle a été baptisée et où son père et son grand-père ont travaillé. Avec ses 70 000 habitants, à 93 % blancs, cette ville ne paie pas de mine. Le centre-ville s’étend sur huit carrés de rues et la moitié des vitrines sont vides. Scranton a déjà connu la prospérité à l’époque des mines de charbon et de la croissance de l’industrie manufacturière, mais aujourd’hui la situation économique est préoccupante.

Bizarrement, je ne vois pas beaucoup de pancartes électorales même si Barack Obama était en ville hier et qu’Hillary Clinton y est aujourd’hui. Je décide de me promener de boutique en boutique et de me présenter aux différents propriétaires, convaincue que la plupart seront de fervents défenseurs de leur vedette nationale. Mon échantillon est bien mince, mais ce que j’ai entendu me laisse perplexe. D’abord, c’est bien la première fois que les gens veulent m’éviter. Je n’ai même pas la chance d’entamer une conversation qu’ils reculent et cherchent à fuir. Tout juste si on me dit que la lutte serra serrée, ce dont je me doute bien. "Pour qui allez-vous voter"? demandai-je. "Sais pas", me répond une dame. "Peut-être Obama mais je ne veux pas que vous me citiez", me dit-elle en se sauvant.

J’arrête dans une pharmacie et à ma vue les quatre préposés arrêtent de parler et retournent à leurs affaires. Pas moyens de sortir un mot de ces gens, malgré tout le charme que je peux y mettre. Je m’arrête à un Mini-Mart, le dépanneur du coin, et enfin Dollar Bill (oui, c’est le nom qu’il me donne) m’explique qu’ici on parle peu et surtout pas de politique. Ce partisan d’Obama croit néanmoins qu’Hillary Clinton remportera la Pennsylvanie.

Pendant que nous discutons, deux clients entrent et sortent aussitôt. Je pense que je fais perdre des ventes à mon Dollar Bill quoiqu’il ne semblait pas trop s’en faire. Enfin, une femme avec un nouveau-né entre dans le magasin et me dit qu’Obama rejoint de plus en plus de citoyens. « Nous avons besoin d’entendre qu’il est possible de changer notre situation. Nous avons besoin de croire qu’il est encore possible de rêver », me dit-elle.

Je finis ma tournée au fameux restaurent bar irlandais Farley où Bill Clinton s’est souvent attablé lorsqu’il était président. Mike lui a servi une couple de bières. « I love the man! », me dit-il. « Mais, elle (Mme Clinton), il n’y a pas beaucoup de gens qui la trouve chaleureuse », rajoute-il avant de me dire qu’il votera pour Obama, lui aussi. En plus, il croit qu’Hillary utilise sa proximité et son historique avec la ville à outrance, et il n’est pas le seul à penser de la sorte.

Les sondages prévoient une victoire d’Hillary en Pennsylvanie. Mais l’ampleur de cette victoire semble plus difficile à prédire. Je me demande bien ce que nous réservent les résultats si les électeurs sont partagés là où Hillary a ses plus profondes racines. Ouf, quelle journée !

Catherine Cano - canovision

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