Friday, November 7, 2008

Catherine en entrevue

La couverture de la presse internationale et le réseau Al Jazeera à l'émission "Isabelle le matin" au 98,5
http://www.985fm.ca/mp3player.php?mp3=192053.mp3

Sunday, November 2, 2008

De Denver à Doha

Il fait plus chaud qu’à Denver, le soleil brille encore plus fort et pourtant sur mon écran de télévision d’où je travaille, le réseau anglais d’Al Jazeera diffuse des extraits d’un discours d’Obama devant plus de cent milles personnes justement à Denver, au Colorado. Il faut bien être à l’autre bout du monde pour soudainement avoir le sentiment qu’en fait, la distance n’a aucun impact sur le sentiment d’urgence et l’importance que revêt indéniablement l’élection américaine. « Cent milles personnes! », s’exclame l’animatrice, « c’est la plus grande foule que le candidat démocrate à la présidence ait attirée depuis le début de cette campagne », poursuit-elle. Pour un moment, j’avoue que je me serais bien retrouvée là-bas.

Ma route professionnelle m’a récemment amenée de Denver, à Montréal, à New York, à Paris et enfin à Doha, la capitale du Qatar, au cœur des pays arables. Ma résidence d’accueil se situe sur les bords du golfe persique. À l’horizon, c’est l’Iran, au Nord le Kuwait et l’Iraq, au Sud l’Arabie Saoudite. Un coin névralgique en cette année électorale américaine.

Et ici, comme ailleurs dans le monde, le principal sujet de discussions est l’espoir d’une victoire de Barack Obama à la tête des États-Unis. Le souhait de voir ce dernier l’emporter repose sur des raisons bien profondes : son ouverture aux cultures, sa volonté d’écouter, de bien comprendre la complexité des enjeux et son désir de prôner des résolutions pacifistes. Cette approche rassure les parties du monde qui vivent sous les bombardements et les attaques en Afghanistan et en Iraq. Elle rassure aussi celles qui luttent contre des dictatures, que ce soit les milliers de congolais forcés de fuir leur village devant la violence et la terreur, ou les citoyens du Zimbabwe torturés à l’extrême parce qu’ils n’ont pas voté pour Mugabe. De la fragilité des situations comme celle en Georgie, aux crises humanitaires, à la catastrophe financière mondiale, la planète a un réel besoin de leadership et de sagesse.

Mais la communauté internationale reste inquiète et incertaine du choix que posera l’électorat américain et compte les heures jusqu’au dévoilement du scrutin. Les grands réseaux de télévision et les organismes de presse ont mis toute leur machine multimédia pour la couverture de la soirée. La BBC, Aljazeera et CNN Internationale présenteront des émissions spéciales de plus d’une douzaine d’heures commençant aux petites heures de matin. Ici, à Doha, on devra se lever à une heure de la nuit pour voir les premiers résultats.

Plusieurs prédisent qu’il faudra attendre les données de l’Ouest et particulièrement du Nevada, du Nouveau Mexique et du Colorado. Chose certaine, il est clair que cette élection si importante pour les Américains, l’est encore davantage pour le reste du monde.

Catherine Cano
Canovision

Thursday, October 2, 2008

Les médias américains ont-ils privilégié Obama

Dans les médias, ce qui s’affiche,
(…) c’est le jeu sur le trou, l’erreur,
le blanc, le morcelé, le
décontextualisé, dans le but de
réactiver un petit nombre
d’oppositions, de structures. »
Patrick Imbert
L’objectivité de la presse, 1989


On dit qu’une image vaut milles mots. Ce jour là, le 18 décembre 2007, à la « une » des journaux - même de la presse francophone - se retrouve une photo d’Hillary Clinton. Un portrait peu flatteur d’une vieille femme aux traits tirés et au visage défait qu’aucun maquillage ne camoufle. Un coup réussit par le « Drudge Report » responsable d’avoir exposé malicieusement cette image dévastatrice de la candidate démocrate, diffusée et publiée par tous les médias. « Voulez-vous d’une vieille femme avec cette allure à la Maison Blanche ? » demande l’animateur conservateur controversé Bill O’Reilly à ses auditeurs. Si quiconque avait des doutes sur l’objectivité de la presse pendant la course à l’investiture démocrate, cette subtile injure est venue confirmer les incertitudes. Si le geste a été condamné par certains médias, l’impact négatif du message pose un verdict sévère, sinon déterminant.
Cet exemple nous permet d’envisager une évaluation de la couverture médiatique en deux temps : une lecture au premier niveau, et ce que l’on peut y lire en filigrane. Dans les deux cas et dans les faits, Hillary Clinton a fait l’objet de couvertures plus défavorables que son rival Barack Obama. Toutes les études confirment que dès le début de la campagne à l’investiture du parti démocrate en janvier 2007 et jusqu’à la fin des primaires, Barack Obama a reçu une couverture de presse plus positive que la Sénatrice de l’État de NewYork. Par contre, il est aussi vrai de dire qu’à partir du « Super Tuesday » le 5 février 2008, la presse est devenue plus critique envers Obama. Bien qu’il soit clair que les médias aient été obnubilés par ce dernier, une partie de la responsabilité incombe également à la campagne de Madame Clinton.
La pré-campagne
Une étude du Centre pour l’excellence en journalisme du « Pew Research Center » résumant les tendances médiatiques révèle que de janvier à mai 2007, Hillary Clinton a reçu une plus grande attention de la presse ; une couverture qui lui a été plutôt défavorable. Sur l’ensemble des nouvelles véhiculées à l’écrit comme dans la presse électronique, trente-sept pourcent (37%) des nouvelles à son sujet ont été négatives et vingt-sept pourcent (27%) se sont avérées plus positives. Barack Obama a de loin bénéficié d’une grande indulgence de la presse, recevant presque quarante-sept pourcent (47%) de couvertures lui étant favorables. Les journalistes ont, dès le départ mis l’accent sur la personnalité des candidats limitant les informations sur leur expérience antérieure et leur programme politique. Obama y paraissant comme l’enfant prodige qui s’éleve contre l’establishment de Washington et la dynastie des Clinton.
De juin à octobre 2007, les médias ont changé de ton et ils se sont attardés davantage sur les bonnes performances d’Hillary Clinton lors des multiples débats. Elle conservait une confortable avance dans les sondages et Barack Obama ne semblait plus impressionner la galerie. Depuis un moment, les médias questionnaient son manque de détermination et d’étoffe pour la présidence, lui reprochant de se perdre trop souvent dans les détails de ses politiques.
Devant le déclin de la campagne d’Obama et le reste de la palette de candidats démocrates pratiquement ignorés dans cette course, Hillary Clinton était déjà devenue la candidate présumée gagnante des démocrates. Lors de la mort de Benazir Bhutto, les journalistes se sont précipités pour dire que ce tragique événement rappelait l’importance pour le (la) prochain (e) Président (e) de posséder une grande expérience en politique étrangère. Le nom d’Hillary Clinton a fait immédiatement surface accompagné d’images de ses rencontres avec Mme Bhutto au Pakistan lorsque cette dernière était Première ministre. La crédibilité de Madame Clinton s’établissait en même temps que s’éclipsait celle de M. Obama.
Quelques semaines avant Noël, les médias couronnaient Hillary Clinton. Elle menait une campagne sans failles et Barak Obama semblait assommé par la machine Clinton. Et puis, il y a eu ce fameux débat le 30 octobre, dans lequel Mme Clinton a commis sa première erreur. Questionnée sur l’intention du Gouverneur de New York de permettre aux immigrants illégaux de détenir des permis de conduire, elle a répondu d’abord qu’elle n’était pas d’accord et questionnée une seconde fois, elle a répondu le contraire. Dès la fin du débat, elle était crucifiée sur la place publique par les médias. On la disait dorénavant vulnérable et moins incontournable. Hillary Clinton venait de donner une arme importante à son principal rival qui s’est empressé de la qualifier de « vendue » aux intérêts politiques du moment. Ce n’est donc pas une surprise si les résultats des sondages, jusqu’à maintenant très favorables à Madame Clinton, ont soudainement commencé à indiquer une chute de sa popularité. Plus les jours avançaient vers les caucus de l’Iowa, plus les médias parlaient favorablement du message d’Obama. Et plus les médias portaient leurs analyses sur la lutte serrée que nous nous apprêtions à voir en Iowa, plus les sondages reflétaient cette nouvelle tendance, confirmant ainsi la presse dans son analyse.
À partir de ce moment, et selon des données du « Center for media and Public Affairs » de Washington, cinquante-huit pourcent (58%) des nouvelles télévisées diffusées d’octobre à décembre 2007 ont été défavorables à Madame Clinton, tandis que Monsieur Obama héritait de nouvelles favorables à soixante-un (61%). Les médias qualifiaient déjà la campagne de Madame Clinton de « fragile », et montraient des images d’électeurs changeant leurs pancartes d’Hillary pour celles de Barack Obama.
Journalisme 101
Devant une couverture devenue presqu’hostile et des sondages qui révélaient un rétrécissement de l’écart entre les deux candidats, Hillary Clinton entame la saison des primaires en perte de vitesse, mais demeure toujours la favorite, quoique plus pour longtemps. Les résultats des caucus de l’Iowa consolident la pensée qu’Obama n’est pas un mirage. Sur le terrain, l’organisation tout azimut de sa campagne permet, le soir du vote, de réussir une mobilisation impressionnante, particulièrement celle des jeunes. Cet engagement de milliers d’électeurs exprime un désir de participer au mouvement de changement ainsi qu’au souhait de reprendre confiance en son gouvernement. Le mouvement était palpable, pas seulement en Iowa, mais il se manifestait depuis quelques mois à travers le pays. L’Iowa offrait aux Américains pour la première fois l’occasion d’en valider concrètement la réalité.
L’erreur des médias a été de trop interpréter les résultats de ces premiers caucus. Le désir de changement était bel et bien réel, et un mouvement important provenant de la base avait pris naissance, mais c’était loin d’être la fin pour Hillary Clinton. Pourtant, les reportages et les analyses rapportant un dérapage presqu’insurmontable de sa campagne se multipliaient. Dépeinte comme la grande perdante, elle a été filmée sous tous les angles désavantageux possibles. De la journaliste Andréa Mitchell du réseau NBC déclarant que Clinton devait tout faire pour éviter une défaite humiliante, aux images montrant des chaises vides dans une salle où la candidate prononçait un discours, ou encore à cette vidéo d’Hillary seule faisant campagne serrant la main d’un vieil homme et l’implorant d’aller voter pour elle. Bref, les médias avaient écrit la fin de l’histoire avant que les électeurs eux-mêmes aient eu un mot à dire. Les journalistes ne véhiculaient que la notion de changement sans valider la feuille de route d’Obama, complètement exclue de toute analyse de fond. Aux yeux des experts, le critère de l’expérience avait disparu et du coup, les sondages ont commencé à péricliter pour Hillary Clinton.
Les signes sur le terrain semblaient contredire cette réflexion devenue généralisée. Malgré une performance brillante lors du débat à trois jours du scrutin, les médias n’ont pas proclamé Madame Clinton gagnante. Au modérateur qui lui posait la question troublante sur le fait que les électeurs ne l’aimait pas, sa réponse fut sentie et humaine : « Cela me brise le coeur », a-t-elle dit avec un sourire un peu gêné. Ce côté sympathique qu’on ne lui connaissait à peu près pas, eut un effet remarquable et immédiat.
Et puis, il y a eu cette fameuse larme que fit dire à plusieurs qu’il s’agissait de manipulation au plus haut degré. Peut-il être véritablement avantageux pour une femme politique qui convoite le poste de la présidence des États-Unis, de montrer sa vulnérabilité en public ? Il n’y a aucun bénéfice à semer le doute sur ses capacités d’être tenace et de ne pas céder sous pression. Pourtant la couverture média fut sarcastique et cynique, certains affirmant que les femmes avaient eu pitié d’elle.
La victoire d’Hillary est le résultat d’un bon travail de terrain, de sa candeur à dévoiler ses émotions et de l’efficacité du message centré sur son expérience. Mais cette victoire est aussi le résultat de la couverture médiatique. L’intense négativisme de cette couverture a été perçu, particulièrement par l’électorat féminin, comme de l’acharnement. Les femmes se sont reconnues dans la bataille d’Hillary et les attaques injustes dirigées contre elle ont fait que ces autres femmes ont soudainement sympathisé.
Le résultat de cette primaire au New Hampshire a suscité une pléiade de mea culpa. Sondeurs, journalistes et experts se sont auto-flagellés s’excusant à moitié d’avoir induit le public en erreur. Ils s’expliquent difficilement la débandade des sondages qui prédisaient une victoire imposante de Barak Obama. Mais pourquoi les médias ont accordé tant d’importance aux sondages, comment eux-mêmes ont-ils pu être si déconnectés ? Chris Mattews de l’émission « Hardball » à MSNBC se demandait de quoi les médias pourraient bien discuter sans les sondages, « on devra rester chez-nous! » avait-il lancé en ondes. Une réaction aberrante mais qui en dit long sur le rôle que se donnent les journalistes aujourd’hui. Qu’en est-il d’éduquer et d’informer sur les programmes politiques des partis par exemple, ou de s’intéresser aux préoccupations des citoyens et analyser l’impact des projets des candidats sur ces populations !
Les données du « Centre for Media and Public Affairs » pendant cette même période et celle qui a suivit jusqu’au « Super Tuesday », confirment la tendance des trois réseaux de télévision – ABC, CBS et NBC à présenter un portrait extrêmement encourageant de Barack Obama. La couverture positive a atteint son apogée entre les primaires de la Caroline du Sud le 26 janvier et le « Super Tuesday » le 5 février, où il a récolté quatre-vingt seize pourcent (96%) de commentaires favorables. En fait, si on s’était fié aux réseaux de télévision, la course à la chefferie était chose faite puisque plus de quatre-vingt quinze pourcent (95%) des commentaires d’experts étaient optimistes quant à ses chances de remporter l’investiture contre quarante-sept pourcent (47%) pour Clinton. La plupart des contenus des entrevues sur l’évaluation de la performance des candidats faisaient l’éloge d’Obama. Quatre-vingt onze pourcent (91%) croyaient à ses chances de succès une fois Président, tandis que soixante-quinze pourcent (75%) émettaient des craintes sur celles de Clinton.
La presse manipulée ?
Une autre étude du Centre d’excellence pour le journalisme du « Pew Research Center », celle-là menée de janvier à mars 2008, note un équilibre de couverture dans le discours médiatique lié aux enjeux sur les personnalités et les caractères des deux candidats. Le Centre précise que Barack Obama et Hillary Clinton ont bénéficié respectivement d’une couverture à 69% et 67% favorable, et ce, tous médias confondus. Ils ont donc tous les deux été en mesure de passer leur message auprès de la presse.
Dans le cas d’Obama, presque trente pourcent (30%) des contenus ont promu l’idée qu’il représentait l’espoir et le changement, et seulement quatre pourcent (4%) ont souligné que ces notions demeuraient vagues et exigeaient plus de détails. Dix-sept pourcent (17%) des médias ont émis l’idée qu’il était charismatique et seulement six pourcent (6 %) des propos de la presse ont mentionné que ses discours étaient éloquents mais vides de signification. Cinq fois plus de nouvelles ont réfuté l’analyse de son attrait limité auprès des différents groupes d’électeurs et les journalistes ont deux fois moins fait état de son manque d’expérience que du changement et de l’espoir qu’il apporterait.
Pour ce qui est d’Hillary Clinton, l’idée qu’elle est prête à diriger le pays dès le jour « un », a fait partie du trente-huit pourcent (38%) des énoncés de la presse et quatorze pourcent (14%) ont rejeté la notion qu’elle était une personne calculée, détestable et inhumaine. Sa plus grande difficulté a été de contrer le discours répétitif de la presse sur le fait qu’elle représentait le passé et non le changement.
Au total, les candidats ont contrôlé l’agenda médiatique et ont influencé trente-neuf pourcent (39%) des angles de couverture, presque dix pourcent de plus qu’en 2004. Le succès des équipes des deux camps à transmettre leurs messages via les médias jette une douche froide sur le travail des journalistes et force un questionnement. La demande des organismes de presse pour de l’information continuellement renouvelée est devenue un obstacle majeur dans l’objectif d’une couverture journalistique rigoureuse. Le manque de temps explique souvent le manque de vérifications nécessaires. Les médias contrôlent de moins en moins leurs contenus mais cela ne constitue en rien une excuse.
Malgré cette apparence d’équilibre dans la couverture sur le plan de l’image des candidats, la tendance de l’ensemble des contenus imprimés et diffusés a continué de favoriser Barack Obama en 2008. La presse est demeurée éblouie par le sénateur de l’Illinois, les immenses foules qu’il attirait et ses nombreuses victoires - particulièrement au début de la saison des primaires. Toutefois, le propos des médias plus positifs à son égard, a aussi trouvé sa source dans les erreurs multipliées du camp Clinton et la campagne négative orchestrée par Billary (Bill et Hillary Clinton).
Plusieurs exemples viennent en tête : la déclaration de Madame Clinton selon laquelle le rêve de Martin Luther King n’a pu se réaliser que grâce au Président Johnson diminuant l’apport historique du Dr. King, les propos de Bill Clinton peignant les similarités de la course d’Obama à celle de Jesse Jackson qui n’avait réussi qu’à remporter des États où les électeurs noirs étaient nombreux, ou encore celle à l’effet que le plan d’Obama en Iraq était un conte de fée. En plus d’accuser l’équipe d’Obama d’irrégularités durant les caucus du Nevada, les Clinton ont laissé des partisans semer des doutes sur la religion de M. Obama et rappeler son utilisation de drogues.
Parallèlement, le camp d’Hillary connaissait des difficultés financières obligeant la candidate à prêter personnellement 5 millions de dollars pour aider sa campagne tandis qu’Obama battait un record de levée de fonds atteignant cinquante-cinq millions de dollars en février. Au même moment, Clinton se voyait forcer d’annoncer le départ de sa directrice de campagne, Patti Solis Doyle.
Accuser les médias de favoritisme à l’endroit d’Obama s’avère en partie justifiée mais ne l’est pas entièrement puisque la couverture de la presse avait un devoir de mettre au jour les réalités difficiles et les erreurs du camp Clinton. À prime abord, les équipes des deux candidats ont réussi à passer les principaux messages de leurs campagnes, mais ont plus de difficulté à contrôler les accidents de parcours et la couverture médiatique. La presse a été manipulée oui, mais pas complètement.
Le medium est le message
Si les erreurs de l’équipe Clinton expliquent en partie une presse moins favorable à leur endroit, elles indiquent également le début d’une tendance défavorable à l’égard de M. Obama. La force des Clinton s’est mesuré dans leur capacité à transformer leurs erreurs en attaque négative contre leur adversaire. L’environnement médiatique de nouvelles en continue sur Internet comme à la télévision, est devenu un allié et un outil utile pour les Clinton, du moins pour un temps. Lorsque Hillary Clinton a parlé du rôle limité de Martin Luther King, Obama n’a pas critiqué les Cinton rappelant au contraire, les nombreuses réalisations de Bill en faveur de la communauté noire. Mais Madame Clinton n’a pas lâché prise et a accusé Obama et son organisation d’avoir déformé ses propos et d’avoir encouragé une réaction négative. La perception en a été que l’équipe du jeune candidat noir avait attisé le feu et profité de la question raciale pour nuire aux Clinton. Résultat : Obama s’est excusé au nom de son équipe et a demandé une trêve. Il s’est excusé pour des propos qu’il n’a jamais tenus et pour des actions que son équipe n’a jamais portées. La stratégie de récupération des Clinton a été brillante. Mieux encore, ils avaient réussi à injecter le concept racial dans la course, un terrain bien glissant pour Obama et sur lequel les médias, n’étant pas à l’aise, ne faisaient que présenter les extraits intégraux encore et encore.
Devant une presse ébranlée, mais encore sous le charme d’Obama et encore impressionnée de ses onze victoires consécutives après le fameux « Super Tuesday », la tactique des Clinton fut ensuite de manifester leur grogne contre les médias les accusant de favoriser Obama. Se référant à un sketch de l’émission populaire « Saturday Night Live », Hillary a suggéré lors d’un débat, de demander à Barack s’il est assis assez confortablement ou s’il a besoin d’un autre oreiller. Toute la semaine qui a suivi, les médias se sont interrogés sur leur objectivité comme le New York Times qui titrait le 29 février : « Are the media giving Obama a free ride? » Une semaine avant les primaires du Texas et de l’Ohio, Obama recevait effectivement soixante-neuf pourcent (69%) de toute la couverture des médias reliée à la campagne.
En réaction aux critiques des Clinton, les journalistes ont entrepris de scruter les réalisations d’Obama en commençant par sa carrière législative et les 129 fois qu’il a choisi de voter « present » sur un projet de loi lorsqu’il était sénateur en Illinois. La presse s’est mise à fouiller les liens d’Obama avec l’homme d’affaire controversé Tony Rezko de Chicago. Au même moment, les journalistes apprenaient qu’un conseiller d’Obama rencontrait un officiel canadien pour le rassurer des propos de son candidat quant à ses réelles intentions de ré-ouvrir l’ALENA. Pour finir, une photo de Barack Obama en habit traditionnel africain faisait surface. Au cours de la même semaine, la campagne Clinton lance la fameuse publicité « 3 heures du matin » faisant référence à celle ou celui qui serait le mieux placé pour répondre à une crise questionnant ainsi l’expérience d’Obama. Clinton n’avait pas non plus hésité à faire l’éloge de John McCain déclarant qu’il avait plus d’expérience que son rival démocrate.
Bref, la tactique a porté fruit puisque la couverture des médias a davantage ciblé les attaques de Clinton sur Obama que la récente défaite de la sénatrice dans onze États. Selon le Centre pour l’excellence en journalisme, la cote favorable d’Obama est tombée en chute libre passant de soixante-dix-sept pourcent (77%) au début de l’année à cinquante-trois pourcent (53%) au début de mars, tandis que celle de Mme Clinton s’est maintenue autour de cinquante pourcent (50%).
Le succès de Madame Clinton en Ohio et au Texas lui permet de cristalliser un traitement médiatique plus favorable. Plus le temps avançait, plus de questions se posaient sur la candidature d’Obama et sa capacité à faire face à un adversaire déterminé. En peu de temps Clinton avait repris l’offensive, et les attaques contre Obama ainsi que la mise en doute sur le travail des journalistes, se sont avérés payants. Clinton avait réussi à déterminer l’agenda des médias encore hypnotisés par le phénomène Obama. Après un an de campagne, il est tout de même étonnant que la presse commence à peine à fouiller le passé du candidat en bonne voie de remporter l’investiture de son parti. Cette fois la presse à bel et bien été manipulée, mais elle le méritait.
La descente en enfer d’Obama ?
La campagne d’Obama fait face à deux controverses majeures entre la mi-mars et la mi-avril juste avant les primaires de la Pennsylvanie. Une vidéo de Jeremiah Wright, conseiller spirituel du sénateur de l’Illinois, tenant des propos jugés antipatriotiques et racistes, est diffusée à la télévision et force Obama à prononcer un discours sur la question raciale. Au même moment, ce dernier domine la couverture médiatique avec soizante-douze pourcent (72%) de toutes les nouvelles sur la campagne, bien que cette couverture ait été en grande partie défavorable. Le discours met fin à l’hémorragie mais malgré les commentaires de la presse généralement positifs sur ce moment historique, plusieurs reprochent à Obama de ne pas s’être complètement dissocié de Wright et de ne pas avoir quitté son Église.
Et un mois après les paroles incendiaires du Révérend Wright, Obama commet une erreur importante. Il doit expliquer une de ses remarques sur l’amertume des électeurs des petites villes, qui, dit-il, les pousse à "s’accrocher" aux armes à feu et à la religion. Madame Clinton a vite fait de qualifier ces commentaires d’élitistes et de condescendants. Même si ces deux histoires sont arrivées tard dans la saison des primaires, la presse devenue moins complaisante envers Obama, le critique fortement. Le message d’espoir et de changement a été relégué aux oubliettes ne représentant que vingt pourcent (20%) des commentaires des médias; ces derniers mettant davantage l’accent (25% de la couverture) sur son manque d’expérience.
Mais Hillary Clinton ne connait pas de répit. Et par sa propre faute, continue d’alimenter ses critiques. À deux semaines des primaires cruciales du 22 avril en Pennsylvanie, sa campagne perd pied avec la déclaration malheureuse de Geraldine Ferraro disant qu’Obama ne serait pas rendu si loin dans la course s’il n’était pas noir, et l’imagination fertile d’Hillary Clinton qui répète à tort avoir été sous les feux ennemis à son arrivée en Bosnie. La démission forcée de Mark Penn, son stratège en chef ajoute au malheur, mais il y a plus. Les Clinton confirment qu’ils sont riches ayant accumulé des revenus totalisant 109 millions de dollars. Par ailleurs, la campagne de la sénatrice Clinton n’a récolté que vingt millions de dollars en mars, deux fois moins que son adversaire.
Le contrôle de l’agenda médiatique par le camp Clinton devient plus laborieux. La controverse du Révérend Wright ne semble pas avoir nuit autant à Barack Obama, ni même, ses propos sur l’amertume de certains Américains. Et puis, à l’approche de la fin de la saison des primaires, et malgré ses victoires, Madame Clinton est incapable de rattraper Barack Obama quant au nombre nécessaire de délégués pour remporter l’investiture. Devant un calcul mathématique qui semble insurmontable, des voix se font de plus en plus entendre pour qu’elle démissionne au nom de l’unité du parti et la presse n’hésite pas à poser la question ouvertement, et sans relâche.
Ce qui aurait pu constituer la descente en enfer de Barack Obama, n’allait donc pas se matérialiser. La sympathie des médias fut apparente lors du débat entre les deux candidats démocrates, organisé par le réseau ABC le 16 avril où Obama a été confronté à un barrage de questions allant de son patriotisme, à ses valeurs, à sa religion. Les journalistes et analystes ont été unanimes à dire, sauf pour un chroniqueur du New York Times, que les modérateurs ont exagéré et ont été carrément injustes envers le jeune candidat. Le débat sur le débat a occupé vingt-deux pourcent (22%) de la couverture média et en général le ton était défavorable envers ABC, accusé d’avoir désavantagé Obama dans sa démarche. Certains ont même insinué que Georges Stephanopoulos, ancien conseillé de Bill Clinton, avait montré ses couleurs en attaquant avec autant d’ardeur l’adversaire d’Hillary Clinton.
La presse en contrôle de l’agenda
Or, malgré la persistance de la controverse du Révérend Wright, malgré les victoires de Clinton dans la moitié des primaires restantes (dont celle importante de la Virginie de l’Ouest), malgré l’inquiétude face aux difficultés d’Obama d’attirer le vote des travailleurs de la classe ouvrière, malgré l’indécision des super-délégués à joindre les rangs d’Obama, tous avaient le sentiment en écoutant la presse que les jeux étaient faits. Lorsque Madame Clinton a proposé d’éliminer la taxe sur l’essence pendant les vacances d’été, les médias se sont précipités pour dénicher tous les économistes qui s’opposaient à cette mesure. Dès le lendemain de sa défaite en Caroline du Nord et de sa mince victoire en Indiana, la presse déclarait un gagnant. Le magazine Time titrait : « And the winner is …Obama» et les analystes disaient à tour de rôle qu’il en était fini de la campagne d’Hillary Clinton. Déjà des médias dont le New York Times annonçait les stratégies pour une bataille entre Barack Obama et John McCain faisant complètement fi de Madame Clinton. Dans cette même période, vingt pourcent (20%) des nouvelles traitaient de son départ et de la division qu’elle perpétuait au sein du parti en restant dans la course.
Et puis son coup de grâce est arrivé un vendredi lorsqu’elle fut obligée de s’excuser pour avoir fait référence à l’assassinat de Robert Kennedy comme une des raisons expliquant ce pourquoi elle restait dans la course. Les médias se sont jetés sur cette proie avec voracité. En vingt minutes, tous les réseaux s’étaient appropriés la nouvelle y retirant tout le contexte. Il fallait voir Hillary Clinton défaite pour comprendre que son intention n’était pas de supposer la possibilité d’une mort soudaine d’Obama, mais plutôt que la course à l’investiture ne s’était pas décidé en 1968 avant juin.
De la misogynie
Jeter un regard sur le travail de la presse pendant la saison des primaires est une entreprise de taille. Et ce regard sommaire ne permet pas d’entrer dans tous les détails. Par contre, j’ajouterai quelques lignes sur la couverture médiatique considérée sexiste.
Hillary Clinton a fait l’objet de plusieurs commentaires désobligeants. Pour preuve, il suffit de consulter le site Internet www.now.org/issues/media/hall_of_shame/index. Que ce soit son manque de chaleur ou ses problèmes maritaux. Ou encore, son habillement qui ne la rendait pas assez féminine (ses fameux ensembles pantalon) et son approche dure et froide qui a fait dire à l’animateur Tucker Carlson de MSNBC qu’elle semble agir trop en « homme » pour être présidente. Ou encore, à l’opposé trop féminine avec ses décolletés plongeants sur lesquels Fox News a consacré des heures d’antenne.
Les émissions américaines satiriques de fin de soirée ont de loin favorisé Mme Clinton. Même s’il faut savoir rire de soi, les messages perpétuaient des perceptions défavorables de la candidate et surtout sexistes, même sous forme de plaisanteries. Un exemple du comédien Jay Leno en dit long: « La sénatrice Clinton dit qu’elle rapatriera les troupes aux pays une fois présidente, mais elle est incapable de rapatrier Bill à la maison ». Ou encore, un journaliste de la radio publique NPR qui se trouve original en comparant Hillary Clinton au personnage de Glenn Close dans le film « Fatal attractions ».
Ses adversaires ont aussi contribué à maintenir un discours misogyne. Le 12 novembre 2007, John McCain se fait interpellé par une citoyenne qui lui demande : « How do we beat the bitch? » McCain rit avec la foule et poursuit comme si de rien n’était en disant qu’il s’agissait d’une excellente question. Peu de journalistes ont condamné cette réaction de McCain et de fait, plusieurs médias ont commencé à mettre l’accent sur la capacité d’Hillary Clinton à être suffisamment respectée et aimée pour être élue. Le même jour, le réseau ABC diffusait un sondage disant que quarante-quatre pourcent (44%) des Américains sont défavorables à Clinton ainsi que des extraits de trois femmes se demandant si Madame Clinton croyait véritablement aux valeurs familiales. Il est vrai que Clinton était loin de faire l’unanimité et qu’un bon nombre de citoyens ont un sentiment d’antipathie viscérale à son endroit. Mais rien n’excuse le silence des médias devant de telles déclarations qui n’avaient surtout rien à voir avec la compétence de la personne mais tout avoir avec des préjugés malsains. Non seulement le discours médiatique a-t-il été défavorable à Hillary Clinton, mais la toile de fond qui se lit en filigrane, est venue appuyer subtilement cette tendance, à la limite pernicieuse envers la première femme candidate à la présidence des États-Unis.
Les tactiques plutôt que les politiques
Vu dans un contexte historique, cet enthousiasme de la presse en faveur de Barack Obama rappelle celui de 1960. John F. Kennedy représentait le renouveau, autant sur le plan de la vision que de la personnalité. Les médias ont été victime également de leur propre ambition. Le désir de maintenir l’intérêt du public, ou des consommateurs, n’est pas étranger à la pression de voir se développer une course serrée. Et comme ce fut le cas en l’an 2000 pour Georges W. Bush, ils ont choisi leur favori. Les biais journalistiques étaient en évidence dans plusieurs organismes de presse. MSNBC par exemple, en a perdu sa crédibilité, tellement le réseau vibrait au son d’Obama. Des émissions comme « Countdown » avec Keith Olbermann analysaient les sondages favorables au jeune sénateur et en omettaient d’autres qui présentaient des données contraires. De plus en plus d’organismes de presse offrent de l’opinion dans leur programmation. Dans la majorité des cas, ces opinions ne sont pas appuyées ou basées sur des faits réels, mais plutôt sur une interprétation de certains faits. Cette tendance lourde ne peut que porter ombrage au métier de journaliste.
S’agissait-il de paresse intellectuelle ou carrément de manque d’objectivité mais chose certaine, les médias ont gardé sous silence pendant plusieurs mois les informations pertinentes sur les réalisations, le passé et les intentions du sénateur de l’Illinois.
En fait, l’ensemble des médias s’est davantage intéressé à la couverture de la course, des stratégies et des tactiques plutôt que sur les enjeux et les programmes politiques. De janvier à mai 2007, soixante-trois pourcent (63%) des informations ont ciblé les stratégies et les tactiques politiques, quinze pourcent (15%) les programmes des candidats, et 1% leur expertise antérieure.
Un an plus tard, l’intérêt des médias est resté invariable, et du 1er janvier au début mai 2008, soixante dix-huit pourcent (78%) des nouvelles se sont concentrées sur les aspects politiques de la campagne. Par exemple, qui a remporté la plus récente primaire. La couverture reliée aux programmes politiques n’a constitué que sept pourcent (7 %) des informations disponibles. Cette tendance a désavantagé Hillary Clinton qui bénéficiait de meilleurs commentaires sur ses politiques que son adversaire. Mais les médias ont choisi de poser cette question seulement une fois sur dix.
La couverture médiatique n’a donc pas évolué depuis les dernières élections et semble aller à l’encontre des intérêts des citoyens. L’an dernier, selon le « Pew Research Center », le public souhaitait à soixante dix-sept pourcent (77%) obtenir de l’information sur la position des candidats relative aux enjeux d’importance, dont la crise économique. Malgré le fait que dès janvier, le pays ait fait face à un ralentissement économique majeur voir même une possible récession, le public attendra jusqu’en mai avant d’être informé sur les conditions économiques inquiétantes et les intentions des candidats.
La presse américaine aura donc échoué à plusieurs niveaux, tant dans son contenu que dans son objectivité. Reste à savoir jusqu’à quel point le public aura été influencé par la couverture médiatique de cette première mais longue étape électorale et jusqu’à quel point, à l’exemple des électeurs démocrates du New Hampshire, ils ne seront pas dupes pour la suite.
Catherine Cano

Saturday, August 23, 2008

Le changement et l’expérience

Les pancartes roulées étaient cachées dans un coin bien gardé du Centre Pepsi, où se tiendra la convention démocrate dès lundi. Un organisateur qui ne pouvait plus attendre, montre fièrement une des affiches sur laquelle est inscrit : Obama-Biden.

Joe Biden est officiellement le choix à la vice-présidence de Barack Obama. Le message est clair : Obama avait besoin de rassurer les Américains sur son manque d’expérience en s’associant avec un des politiciens les plus respectés en matière de sécurité nationale et de politique étrangère.

Le sénateur du Delaware né en Pennsylvanie et issu d'un milieu ouvrier et catholique, est un personnage d'une grande humilité. Étudiant brillant, il a gradué en droit avec honneur - « magna cum laude » - sauf pour sa classe de français, où son talent limité pour les langues ne lui a valu qu’un faible D.

Joe Biden a la réputation d’être un homme d’action qui compte plusieurs réalisations à son actif, particulièrement à titre de président de deux comités importants au sénat: celui des affaires étrangères et celui des affaires judiciaires. Il a une connaissance intrinsèque des rouages politiques à Washington; un atout important pour la campagne d’Obama.

Élu au sénat américain à 29 ans, Joe Biden n’a jamais hésité à dire ce qu’il pense et n’est pas ce qu’on appelle un « yes man ». Candidat à la présidence à deux reprises, il a plus d’une fois déclaré que Barack Obama n’était pas prêt à être président.

Les républicains n’ont pas perdu de temps. Aux petites heures du matin, une publicité montrant ces déclarations était apportée en main propre au studio de CNN. L’attaque est faible puisqu’Obama prouve qu’il a l’intelligence de bien s’entourer. Les républicains, qui depuis des semaines positionnent leur candidat comme celui qui a le plus d’expérience, viennent de perdre un argument de taille. Joe Biden avec ses 36 ans d’expérience en politique, en a dix de plus que John McCain.

L’équipe du candidat démocrate prouve par ce choix qu’ils font une bonne lecture de l’état d’esprit des Américains. Selon les récents sondages, ces derniers souhaitent toujours un changement en profondeur à Washington, mais ils croient également que le poste de président exige une grande maturité. Biden apporte cette qualité au ticket.

Les partisans d’Hillary Clinton sont bien déçus et l’ancienne candidate elle-même ne semble pas plus heureuse. Lorsqu’on lui a demandé hier soir si elle tenait encore au poste de vice-président, elle a répondu sèchement : « je n’ai jamais dis que j’étais intéressée. » Toute une convention en perspective !

Catherine Cano- Canovision

Thursday, August 21, 2008

Et si c’était Hillary ?

Barack Obama est sur le point d'annoncer son choix à la vice-présidence et les noms qui circulent sont ceux de Joe Biden, Evan Bayh et Tim Kaine. Si un de ces candiats est choisi, cette nomination fera peu de vagues. Or, le parti qui semble déterminé à s'auto-détruire, a besoin d'un bon coup. Pas plus tard qu'hier, je m’interrogeais sur tout ce bruit autour des tensions et des divisions au sein du parti démocrate. Je me questionnais : "Et si tout cela n’avait tout simplement pas été orchestré pour nous permettre d’être témoins d’un coup de théâtre extraordinaire à la convention démocrate?" Il m’apparaît difficile de croire que ce manque de discipline chez les démocrates soit admis, considérant surtout l’aspect crucial de cette élection pour le parti.

Choisir Hillary Clinton comme colistière relèverait du vrai coup de théâtre. Chose certaine, cette annonce changerait radicalement l’allure de la convention, redonnerait une vie à une campagne en perte de vitesse et surtout animerait la population en quête d’un sauveur; et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, cette association unirait toutes les troupes démocrates. Les femmes encore déçues rejoindraient les rangs et les travailleurs incertains de l’empathie d’Obama retrouveraient la connexion qui leur manquait. Les États de la Pennsylvanie, de l’Ohio, ceux entourant les Appalaches, et ceux de l’Ouest où Hillary et Bill sont grandement respectés, applaudiraient cette décision. Et c’est sans parler de la Floride où les électeurs avaient majoritairement favorisé Hillary lors des primaires.

Mais qu’arrive-t-il de tous les arguments sur lesquels plusieurs s’appuyaient pour rejeter cette option ? Il y a deux mois la situation était différente. La récent conflit entre la Russie et la Georgie rappelle aux Américains que les questions de sécurité nationale demeurent importantes. Ils souhaitent une approche plus internationaliste de leur Président, mais exigent que ce dernier détienne une expérience incontestée et sache naviguer dans les méandres politiques de Washington. Or, la tournée victorieuse d’Obama au Moyen-Orient et en Europe n’a pas eu l’impact souhaité. Par contre, sa déclaration mitigée sur la crise en Georgie, lancée presque sur le bord d’une plage à Hawaï, n’a rien fait pour convaincre la population qu’il a l’étoffe nécessaire pour le poste qu’il convoite.

Par ailleurs, mon ami Jep, un ancien conseiller du Sénateur Gary Hart avec qui je prenais un café ce matin, m’expliquait que Barack Obama ne fait pas face à Georges Bush. Les citoyens réalisent bien que ce dernier n’est pas candidat aux élections et juge que John McCain, pour qui ils ont un grand respect, est en mesure de faire face à de telles situations. Mais la position de McCain sur l’intervention américaine en Iraq et son intention d’y garder les troupes, a également entraîné un questionnement sur son jugement. Une équipe Obama-Clinton représenterait à la fois le bon jugement et l’expérience. Cette double force rendrait McCain plus vulnérable.

Par ailleurs, le candidat républicain s’avère un adversaire redoutable et son parti ne ménage rien pour attaquer Obama en ayant recours aux pires méthodes négatives. Les sondages montrent que cette tactique n’est pas sans impact puisque le Sénateur de l’Illinois a perdu son avance. Hillary qui n’a pas froid aux yeux, serait un atout dans l’affrontement contre McCain et les Républicains. Elle pourrait s’en prendre à McCain sur le même ton, pendant qu’Obama garderait ses distances en continuant de marteler les changements politiques qu’il compte apporter comme Président.

Pour Hillary Clinton, être numéro deux signifie exercer une influence certaine auprès de la présidence. Al Gore et Dick Cheney ont redéfini le rôle de la vice-présidence en lui attribuant un plus grand pouvoir. Hillary Clinton est une femme brillante et travailleuse qui apporterait intelligence et aplomb à l’administration Obama.

Combien de fois a-t-on répété que Barack Obama et Hillary Clinton formerait une véritable équipe de rêve? Peut-être y avait-il une bonne raison ? Quand on regarde la liste des candidats pour ce poste de vice-président, aucun ne présente une fiche parfaite. Mme Clinton a commis des erreurs pendant sa campagne à l’investiture démocrate et plusieurs n’ont pas apprécié ses méthodes. Mais son programme était colossal et personne n’a jamais douté de sa capacité à diriger le pays.

Ah oui, il y a une autre chose que je ne voudrais pas oublier. L’annonce du colistier ou de la colistière se fera en Illinois; l’État qu’Obama représente au Sénat américain, mais aussi l’État où Hillary est née et où elle a grandi. Un hasard vous me direz… peut-être!

Catherine Cano - Canovision

Wednesday, August 20, 2008

Fini les vacances !

Les camions satellites des réseaux de télévision sont arrivés et l’analyste vedette de CNN, Bill Schneider, se promène avec son autobus dans tout Denver. Les équipes de construction en train de transformer l’aréna de hockey de l’Avalanche se relaient jours et nuits, et les entreprises de taxi déjà en ligne à l’aéroport, salivent à la pensée de voir débarquer des milliers de visiteurs démocrates.

De l’autre côté de la ville, les réunions du comité organisateur de la convention démocrate se multiplient. En parlant à un de mes contacts responsable du déroulement des quatre jours de cette convention, j'ai senti une inquiétude. Le gouverneur, le maire et les co-présidents de campagne communiquent entre eux pratiquement à toutes les heures. Combien de partisans d’Hillary auront des enseignes, porteront des macarons de leur héroïne, scanderont son nom, et voteront – même symboliquement pour elle, se demandent-ils ? On craint que le mécontentement et les divisions au sein des troupes, donnent de l'eau au moulin aux manifestants déterminés à se faire entendre.

Ils ont des raisons de s' inquiéter. Bill Clinton a refusé de dire qu'Obama avait les aptitudes pour gouverner. Et puis Hillary n'a pas dissuadé ses troupes, qui brandissaient la menace de voter pour McCain si elle n’était pas inscrite sur le bulletin de vote au même titre que son ancien rival. Enfin, les membres du « groupe de Denver » et du groupe appelé « PUMA » (Party unity my ass) signent des pétitions, donnent des entrevues et accusent leur propre parti d’être anti-démocratique. S’agit-il d’un suicide collectif ? Est-ce que ces centaines de Démocrates préfèrent laisser le pouvoir de la Présidence au parti Républicain ?

Et si tout cela était orchestré ? Et si Hillary Clinton, dans un coup de théâtre mardi lors de son discours, s’écriait devant tous qu’elle ne souhaite plus que son nom soit sur le bulletin de vote, qu’elle et ses partisans ont accompli leur mission immortalisant ce moment historique de sa « presque » nomination ? Impossible diront les journalistes convaincus au contraire que ça va chauffer. On entend dire que la moitié de la Chambre des représentants voterait pour Hillary et les médias interviewent heure après heure des partisans de Clinton insatisfaits de la performance d’Obama depuis un mois. Le candidat semble même avoir perdu sa passion depuis son retour d’Europe.

L’équipe d’Obama, jusqu’à présent exceptionnellement brillante, aurait-elle soudainement perdue pied ? Ou s’agit-il d’une stratégie pour diminuer les attentes devenues définitivement trop hautes envers Obama? Un ami politicien me rappelait une règle importante hier. Un parti politique n’aime jamais être trop en avance dans les sondages la veille d’une campagne électorale.

Et puis, c’est l’été et il y a un mois les Américains étaient saturés de nouvelles politiques et se disaient fatigués de la trop large couverture médiatique accordée à Obama. Ils se sont donc réfugiés dans l’écoute des Jeux olympiques. Mais dimanche, ce sera la fin des compétitions et pour les Démocrates, cela signifie la fin des vacances. Est-ce que le manque de discipline et la dissidence trop évidente au sein du parti n’est qu’une tactique pour endormir John McCain et les médias? Je ne serais pas surprise d'être témoin la semaine prochaine du plus puissant des spectacles politiques ; un moment historique incomparable susceptible de faire regretter à plusieurs leurs prédictions. Chose certaine, Barack Obama n'a pas encore dit son dernier mot.

Catherine Cano - Canovision

Tuesday, August 19, 2008

Friday, August 15, 2008

Rendez-vous historique à Denver*

Plus de 3 000 détenus de Denver ont quitté leurs cellules au cours des derniers mois. Non, la ville n’est pas redevenue un bled perdu du Colorado où les chasseurs de primes font la loi, comme à l’époque de la ruée vers l’or ! Ces prisonniers ont simplement été transférés pour faire de la place en cas d’arrestations massives pendant la convention démocrate, qui se tiendra du 25 au 28 août.

Denver, belle ville blottie dans les Rocheuses (à un mille d’altitude, d’où son surnom de « Mile High City »), accueillera en effet un rassemblement politique historique, qui consacrera le premier candidat noir à la présidence des États-Unis. Et on craint que de nombreux manifestants ne viennent perturber l’une ou l’autre des 1 500 réceptions (!) prévues et, surtout, les discours, qui s’étaleront sur quatre jours. Des dizaines de milliers de représentants de diverses organisations, pacifistes pour la plupart, s’apprêtent à planter leurs tentes dans des parcs, non loin de l’aréna de l’équipe de hockey l’Avalanche, où se déroulera le congrès.
Un groupe appelé Recreate ’68, opposé à la guerre en Irak, a annoncé son intention de s’inspirer du mouvement de protestation contre la guerre au Viêt Nam, qui a perturbé la convention démocrate de Chicago, en 1968. Les porte-parole ne cachent pas qu’il pourrait y avoir de la violence si les activistes se sentent provoqués par la police.

Ce congrès sera historique à plus d’un titre. Barack Obama présentera son discours d’investiture au Stade Invesco, immense terrain de jeu des Broncos, l’équipe de football de la NFL. Un seul autre candidat présidentiel a fait son discours d’investiture dans un stade de football : le mythique John F. Kennedy, à Los Angeles, en 1960. L’auditoire sera impressionnant — le stade compte 76 000 places — et le symbole puissant : le 28 août marquera le 45e anniversaire du célèbre discours « I Have a Dream », prononcé par Martin Luther King à Washington, en 1963.
À deux semaines ou presque du grand jour, la ville de 2,5 millions d’habitants, en comptant les banlieues — presque autant que l’agglomération montréalaise —, a perdu ses allures tranquilles. Les chambres d’hôtel sont toutes réservées, on doit faire la queue pour obtenir une place dans un resto du centre-ville et certaines rues sont déjà fermées à la circulation. Plus de 50 000 visiteurs sont attendus.

Les commerçants ont bien l’intention de profiter de la manne. Le « LoDo », comme on surnomme le lower downtown (basse ville), fourmille déjà d’activités. Dans la 16e Rue, artère piétonnière qui traverse Denver, le grand magasin de souvenirs Wild West déborde d’articles rappelant l’histoire de l’Ouest, du chapeau aux bottes de cowboy en passant par un caillou qui imite une pépite d’or ! « Welcome to Denver ! » me dit Tom Noel, 64 ans. Professeur d’histoire à l’Université du Colorado, il a écrit une trentaine de livres sur cet État qui doit son nom — « coloré », en espagnol — à son sable et à ses magnifiques rochers rouges. Attablé au resto Baur, au centre-ville, Tom Noel rappelle que Denver est née à l’époque du Klondike, grâce à ses mines d’or et d’argent. Après avoir été connue pour ses saloons et longtemps désignée comme la « cowtown » de l’Ouest, elle est aujourd’hui une ville moderne, qui vante son architecture avant-gardiste (dont celle du Musée des beaux-arts, signée Daniel Libeskind), son savoir-faire en biotechnologie et en médecine… Le Colorado revendique même la paternité des sandales Crocs — mais les Québécois, eux, savent qu’elles sont nées chez eux et ont été vendues à des Américains ! « Denver possède le sixième aéroport en importance aux États-Unis. Et on y trouve de nombreux consulats, dont celui du Canada », ajoute Tom Noel.

Denver compte bien profiter de ces quatre jours pour se donner une envergure internationale. D’autant que quelque 600 représentants des gouvernements de 100 pays y sont attendus. Et que les médias seront présents en masse pour assurer la couverture du sacre d’Obama : plus de 15 000 accréditations ont été délivrées à des journalistes, réalisateurs, caméramans, etc.
Le choix de Denver n’est pas anodin de la part des démocrates…

Au Colorado, plus du tiers des électeurs se disent sans réels liens politiques, soit autant que le pourcentage de partisans démocrates (34 %) ou de républicains (31 %). Si le candidat à la présidence John Kerry avait obtenu les 19 votes des États du Colorado, du Nevada et du Nouveau-Mexique, en 2004, il aurait été élu à la place de George W. Bush. Mais il n’a pas su séduire ces électeurs indépendants. Cette fois, le parti les courtise énergiquement, encouragé par le fait qu’ils ont voté majoritairement pour des candidats démocrates aux élections de mi-mandat, en 2006.

Le thème de ces quatre jours sera la démocratie. Les démocrates désirent profiter de l’occasion pour redonner aux États-Unis leur notoriété d’autrefois, après les années sombres de l’administration Bush. De nombreux séminaires seront dirigés par Madeleine Albright, secrétaire d’État dans le gouvernement de Bill Clinton. Par ailleurs, une exposition, dans le stationnement du Stade Invesco, reconstituera le Bureau ovale du président et présentera aussi des objets ayant appartenu à d’anciens locataires de la Maison-Blanche.

Sans conteste, les organisateurs voient grand. Ils ont la prétention de préparer l’assemblée d’investiture la plus « verte » de l’histoire. General Motors, commanditaire officiel, fournira aux 3 000 chauffeurs bénévoles chargés d’assurer le transport des délégués et autres invités de marque des véhicules hybrides ou roulant à l’éthanol. Lequel éthanol sera fait à partir des rejets de fabrication des bières Coors. Par ailleurs, 1 000 bicyclettes seront mises gratuitement à la disposition des 5 000 délégués. Et l’utilisation des transports en commun sera fortement encouragée. Le plan, qui comprend 10 points principaux, est ambitieux.

Katherine Archuleta, conseillère principale du maire John Hickenlooper, ne dort pas beaucoup ces temps-ci. Son patron est le « collecteur de fonds en chef » de la convention. Et le comité responsable des commandites peine à trouver les 50 millions de dollars nécessaires à la tenue du congrès. Le jour de notre rencontre, au début de juillet, il manquait encore 20 millions... Du coup, on a dû annuler certaines activités, dont les deux douzaines de fêtes d’ouverture des délégations des différents États.

Katherine Archuleta n’est pas la seule à mal dormir. Depuis des semaines déjà, vers 2 h du matin, les habitants de Denver sont réveillés plusieurs nuits par semaine par le bruit des hélicoptères qui survolent la région à basse altitude. Après le 11 septembre 2001, la sécurité lors des grands rassemblements a été maximisée. Et la décision de Barack Obama de prononcer son discours d’investiture devant un public aussi vaste crée des inquiétudes supplémentaires. Les Américains ne sont pas sans penser aux assassinats de John F. Kennedy et de Martin Luther King...

Les habitants de Denver sont enthousiastes à la veille de la convention : pas moins de 22 000 bénévoles sont déjà inscrits à l’un des innombrables comités. Mais d’autres sont moins ravis. Au point qu’une agence de voyages de Denver a organisé la « grande escapade », un tour du Colorado en autocar d’une durée de six jours. Elle compte bien que quelques centaines de personnes préféreront fuir l’avalanche de politiciens, les fêtards et l’interminable trafic !

Catherine Cano - Canovision
* Article publié dans la revue l'Actualité - septembre 2008

Friday, August 8, 2008

Le pouvoir des Clinton

À deux semaines de la convention démocrate et de la nomination officielle de Barack Obama comme candidat à la présidence, les doutes sur l’unité du parti refont surface. Même si la majorité des partisans d’Hillary Clinton se sont rangés du côté du Sénateur de l’Illinois, un bon nombre, réunis sous le nom du «groupe de Denver », continue de propager son mécontentement. Ces Démocrates tiennent à ce que le nom d'Hillary Clinton soit sur le bulletin de vote afin qu'il s'inscrive à jamais dans l’histoire américaine, pour bien se rappeler que pour la première fois, une femme à presque remporter la nomination d'un parti. Mais l’intention est plus que symbolique. C’est aussi l’occasion de donner une dernière chance aux délégués de changer d’idée.

Pour Barack Obama, ce scénario est cauchemardesque. Tout doit être sous contrôle pendant la convention. Permettre à ce groupe et à d’autres délégués encore amers par la défaite d’Hillary de prendre un tel pouvoir, est définitivement trop risqué. Risqué parce qu’il arrive à un moment où Obama perd de la crédibilité aux yeux du public face à son adversaire. Les attaques multipliées des Républicains depuis quelques semaines ont ébranlé la force de la candidature d’Obama dans plusieurs régions baromètres du pays. Dans les coulisses démocrates, on considère qu’Hillary aurait été plus apte à faire face aux critiques de McCain. On ne pourrait pas lui reprocher de manquer d’expérience et de se prendre pour « Dieu- le Sauveur », comme plusieurs ont caricaturé Obama après son discours prononcé devant une foule de 200,000 personnes en adoration à Berlin.

Le pire ennemi d’Obama n’est pas McCain ni le parti républicain. Pour la première fois depuis juin, depuis la fameuse scène à Unity au New Hampshire où Clinton et Obama ont uni officiellement leur force, Hillary a fait campagne pour son ancien rival cette semaine. Bien qu'elle lui ait fait rencontrer ses bailleurs de fonds, et que Bill ait eu une conversation qu’il a qualifiée de « très bonne » avec le vainqueur des primaires, depuis deux mois, les Clinton se sont plutôt fait discrets auprès de l’électorat américain. Ils sont plus bavards auprès de ceux qui leur restent loyaux. Lors d’un « chat » sur Internet avec ses partisans, Hillary a jeté de l’huile sur le feu. Selon elle, les 18 millions de démocrates qui l’ont appuyé doivent avoir le clair sentiment d’avoir été entendus et elle refuse de s’opposer à la proposition de mettre son nom sur le bulletin de vote lors de la convention.

Jusqu’à présent, l’équipe d’Obama ne voyait pas d’inconvénient à la discrétion des Clinton cet été. On sait que les Républicains ont des publicités toutes prêtes qui mettront l’accent sur les déclarations de Bill et Hillary contre Barack Obama pendant les primaires. Vous vous rappelez certainement de cette phrase d’Hillary disant que John McCain avait plus d’expérience en matière de sécurité nationale et qu’il était davantage prêt à gouverner qu’Obama. Des montages vidéo circulent depuis déjà un bon moment sur Youtube et la capacité des Républicains d’utiliser ce matériel efficacement ne fait pas de doutes. Tout en reconnaissant la nécessité d’avoir recours au populaire Bill et à l’influente Hillary, la campagne du jeune Sénateur de l’Illinois espérait garder les Clinton hors du radar aussi longtemps que possible et activer leurs forces sur le champ de bataille subtilement sans tambours ni trompettes. Entre-temps, le plan était d’offrir à Hillary et à Bill leur moment de gloire pendant la convention, rassurer les délégués encore déçus et montrer avec une vigueur incontestée l’unité du parti derrière Barack Obama.

Mais tout cela risque de déraper. Par leur encouragement à poursuivre le débat pendant la convention, les Clinton vont finir par mettre Barack Obama au pied du mur. Le risque est trop grand pour les Démocrates et les enjeux trop importants pour le pays. Les Clinton détiennent le pouvoir d’assurer la prochaine présidence à leur parti, ou de miner le leadership d’Obama. Plusieurs croient qu’ils sont trop conscients de l’importance de leur héritage dans l’histoire pour saboter les chances de reprendre la Maison Blanche en 2008. D’autres sont plus cyniques et personne n’est dupe : le mouvement pour la campagne d’Hillary en 2012, est déjà entamé.

Catherine Cano - Canovision

Convention démocrate – discours

Lundi 25 août: Michelle OBama
Mardi 26 août: Hillary Clinton (Chelsea pourrait présenter sa mère)
Mercredi 27 août: Bill Clinton prononcera son discours juste avant celui de la ou du colistier
Jeudi 28 août : Barack Obama

À noter: tous les discours auront lieu entre 18h00 et 23h00, heure de l’Est

Thursday, July 31, 2008

L'impact d'une campagne négative

Catherine en entrevue à l'émission "Montréal Maintenant" avec Esther Bégin, le 31 juillet
http://www.985fm.ca/mp3player.php?mp3=165893.mp3

Wednesday, July 30, 2008

Obama ébranlé

Barack Obama ne pouvait souhaiter une meilleure campagne. En contrôle de l’agenda tant sur le plan de la politique étrangère américaine que des questions domestiques comme la crise économique, le chemin vers la Maison Blanche s’annonçait alors presqu’assuré. Conscient d’un fond de racisme persistant au pays, il avait même presque réussi à faire oublier qu’il est noir.

Par surcroît, son adversaire John McCain, qui a toutes les misères du monde à mettre un pied devant l’autre sans trébucher, multiplie les erreurs. Il a d’abord déclaré que l’Iraq et le Pakistan étaient des pays limitrophes. Et puis, il a affirmé que les forces d’Al Quaida avaient été chassées de la province d’Anbar en Iraq grâce aux troupes américaines envoyées en renfort; ce qui est faux. Ou encore, il était convaincu que le conflit en Iraq était le seul et le plus important à survenir depuis la tragédie du 11 septembre, omettant ainsi la guerre en Afghanistan.

Perdant la bataille de l’image et constamment sur la défensive réalisant que les politiques de McCain ne font que rappeler celles de W. Bush, les Républicains ont décidé d'attaquer de front leur rival et de miner sa crédibilité. Ils se sont repliés sur d’anciennes stratégies de campagne optant pour des attaques négatives contre le candidat démocrate. La dernière en lice est une publicité dans laquelle on compare la « vedette » Barack Obama à Paris Hilton et Britney Spears. L’insulte est de taille. Après une tournée internationale victorieuse où plus de deux cents milles personnes se sont déplacées pour l’entendre à Berlin, et pendant laquelle sa politique étrangère en Iraq a pris toute sa crédibilité, une telle comparaison est absolument risible et ne mériterait pas que l’on s’y attarde.

Mais en réalité il n’y a rien de très drôle dans cette approche de John McCain qui, bien avant Obama, se disait pourtant si honnête et si désireux de changer la politique à Washington. S’il accepte de poursuivre cette tactique sans broncher, c’est qu’elle réussit. Elle réussit à semer le doute et bien plus, elle vient confirmer les craintes des électeurs qui n’ont pas le souci ou le temps de vérifier les faits.

Dans un état baromètre comme le Colorado, l’équipe républicaine bombarde littéralement les ondes. Et en trois semaines, les sondages qui favorisaient Obama de 4 à 6 points, le donnent perdant de 4 points aujourd’hui. Nous sommes toujours dans la marge d’erreurs, mais ces chiffres sont des indicateurs de la force de frappe de McCain.

Les Républicains diffusent présentement quatre publicités véhiculant des messages controversés et faux: 1-Obama préfère perdre la guerre en Iraq en retirant les troupes américaines trop rapidement, 2-il est responsable de la montée du prix de l’essence, 3-il a le temps de jouer au basket-ball mais pas de rencontrer des soldats blessés et 4- il n’est qu’une star arrogante mais sans profondeur. Ces messages questionnent d’une part, son patriotisme et son sens des priorités, renforçant par ailleurs une image élitiste et déconnectée des misères du peuple.

Des messages controversés et faux, mais qui touchent une corde sensible. Pendant que Barack Obama se promenait en Europe, les travailleurs de l’industrie du pétrole et du gaz naturel ici au Colorado ont applaudi la décision du Président Bush - appuyé de John McCain, de reprendre l’exploitation des puits qui sont nombreux à travers l’État. Dans une économie en récession, la création de nouveaux emplois est bienvenue. Et puis, dans un coin du pays où l’automobile est le principal moyen de transport, on avait également approuvé la proposition du candidat républicain de susprendre la taxe sur l’essence pendant l’été ; un bénéfice qui aurait permis aux citoyens d'épargner en moyenne cinquante dollars par mois. Deux politiques auxquelles Obama s’est opposé.

Enfin, Barack Obama fait de l’Afghanistan une bataille à finir et re-déploiera les troupes de l’Iraq vers ce pays. Cette décision inquiète un certain nombre d'électeurs. La guerre en Iraq a déjà coûté cher aux États-Unis tant sur le plan économique que sur le plan humain. Le pays a-t-il les moyens de s’engager davantage dans une guérilla ? Combien d’années faudra-t-il pour sortir victorieux d’une lutte contre le terrorisme. Est-ce qu'une telle victoire est même possible ?

La campagne de John McCain est outrageuse parce qu’elle propage des faussetés. Mais les messages rejoignent indéniablement l’électorat qui continue de s’interroger sur Barack Obama, ses valeurs et ses politiques.

Catherine Cano - Canovision

Sunday, July 27, 2008

Convention démocrate : compte à rebours

On s’y perd à tenter de compter le nombre de comités mis sur pied pour préparer la convention démocrate qui débutera le 25 août prochain, soit dans 4 semaines exactement, à Denver au Colorado. Déjà des enseignes, souhaitant la bienvenue aux 50,000 visiteurs attendus, sont posées dans les rues du centre-ville.

La ville n’en est pas à sa première convention puisqu’il y a exactement cent ans, en 1908, elle recevait celle des Démocrates qui avait couronné William Jennings Bryan battu ensuite à l’élection générale par William H.Taft. Denver n’en est pas non plus à son premier grand événement puisque elle a tenu une réunion du G-8 en 1997 et a reçu la visite du Pape en 1993.

Malgré une chaleur accablante et le fait que nous sommes sur le point de battre un record de température – quinzième journée de suite à plus de 30 degrés celsius -, une grande fébrilité s’est emparée des citoyens. Jeanie est une démocrate convaincue et, âgée de soixante ans, elle a décidé de s’impliquer. En consultant le site Internet de la convention, elle a mis la main sur ce qu’elle cherchait : « Comment devenir bénévole». Après avoir coché toutes les cases sans retenu, elle reçoit un coup de fil. « Mme Johnson, nous avons besoin de 3,000 chauffeurs privés». Excitée, elle s’enregistre immédiatement : « même si je ne serai pas dans l’enceinte » dit-elle fièrement, « je vais contribuer à faire de ce moment un succès pour ma ville et pour les Démocrates ». Les organisateurs de l’événement, qui durera quatre jours, n’ont eu aucune difficulté à recruter vingt-deux milles personnes pour travailler à titre de bénévoles.

Le centre Pepsi, la fameuse aréna de l’équipe de hockey l’Avalanche où se tiendra l’événement, est méconnaissable. Des milliers de mètres de câbles ont été tirés, une vingtaine de serveurs ont été installés pour les 15,000 médias qui couvriront la convention et mille lignes de téléphone ont été branchées.

À un mois de ce moment historique qui célèbrera la nomination du premier noir candidat à une présidentielle américaine, tout semble sous contrôle si on en croit les responsables. Mais, ce n’est pas tout à fait vrai. Il manque encore 20 millions de dollars pour couvrir les coûts de cette « extravaganza ». C’est un déficit que la ville de Denver ne peut se permettre et la situation en inquiète plus d’un.

Mais les organisateurs sont pris avec des problèmes encore plus graves. Il semble qu'Oprah et son entourage aient tenté de déloger les Clinton de l’hôtel Brown Plaza parce qu’elle se disait trop loin de son protégé et les Kennedy n’ont toujours pas trouvé une maison qui réponde à leurs attentes.

J’ai songé offrir ma chambre d'amis à Mme Winfrey, mais elle est déjà prise. Avoir su ! … à suivre.

Catherine Cano -Canovision

Friday, July 25, 2008

Impact de la tournée d'Obama

Catherine en entrevue à l'émission "Montréal Maintenant" avec Esther Bégin, le 24 juillet
http://www.985fm.ca/mp3player.php?mp3=164523.mp3

Catherine à l'émission "La Tribune" de Radio-Canada avec Jacques Beauchamps, le 25 juillet
http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia%3Dhttp://www.radio-canada.ca/Medianet/2008/CBF/LaTribune200807251215_1.asx

Wednesday, July 23, 2008

Voyage d'Obama 2

Catherine en entrevue à l'émission Montréal Maintenant, avec Esther Bégin, le 21 juillet
http://www.985fm.ca/mp3player.php?mp3=164023.mp3

Tuesday, July 22, 2008

Stratégie 201

Il semble bien que les Américains puissent enfin voir la lumière au bout du tunnel. La question n’est plus de savoir si les soldats américains sortiront de l’Iraq, mais plutôt, à quel moment. Depuis vendredi, nous assistons à un revirement de situation. D’abord, accord-surprise! Vendredi dernier, Washington et Bagdad s’entendent pour dire qu’il y aura un retrait éventuel des troupes américaines, mais ne fixent pas de date. Le lendemain, le Premier ministre iraquien pousse l’audace en déclarant non seulement que son pays souhaite un départ des soldats américains, mais ajoute l’échéance de décembre 2010. Al-Malaki n’avait rien à perdre puisque les iraquiens n’ont jamais caché leur hâte de voir partir les Américains de leur territoire. La visite de Barack Obama tombait juste à point et Al-Malaki se défend bien de s’ingérer dans la campagne électorale américaine. Tout au plus, le temps est-il venu de faire pression sur le gouvernement Bush qui, à son avis, ne semble pas suffisamment pressé de quitter l’Iraq.

La presse a fait grand état toute la journée du voyage victorieux d’Obama. La décision du gouvernement de l’Iraq vient appuyer la stratégie du candidat démocrate qui prévoit rapatrier les forces militaires dans les 16 premiers mois de son mandat. Pourtant, John McCain s’est évertué toute la journée à préciser que si les gouvernements peuvent discuter de la possibilité d’un retrait éventuel, c’est en grande partie grâce à la solution qu’il a préconisée l’an dernier; celle d’envoyer des renforts militaires pour stabiliser le pays. Cette même stratégie contre laquelle s’est élevé son rival, Barack Obama.

À court terme, il ne fait pas de doute qu’Obama bénéficie des déclarations provenant du gouvernement iraquien. D’abord, la politique du Sénateur de l’Illinois semble se baser sur une nouvelle réalité militaire et politique. Les conditions sur le terrain se sont améliorées considérablement depuis six mois, et les iraquiens souhaitent prendre leur destinée en main. Et puis, la population américaine est impatiente de voir une fin à cette guerre.

À moyen terme, c’est-à-dire, d’ici l’élection de novembre dans plus de trois mois, qu’auront retenu les électeurs ? Donneront-ils le crédit à Barack Obama ou à John McCain ? Est-ce que les conditions sur le terrain ce seront détériorées au point de devoir retarder l'échéance du départ ?Depuis la déclaration de l’administration Bush vendredi dernier, tout le monde est d’accord pour rapatrier les troupes. Là, où il y a encore des divergences, c’est le moment. McCain croit que la situation reste fragile. Un stratège républicain admettait ce matin que si son parti veut conserver la Maison Blanche, McCain doit aussi affirmer clairement que les États-Unis ne seront pas pris dans ce conflit indéfiniment. La stratégie est donc de peaufiner le discours de façon à ce que la position de McCain se rapproche de celle de son adversaire, et ce, sans qu’il ait à décider d’un calendrier précis. Si tôt ou tard les soldats sont de retour au pays, se disent les républicains, c’est tout ce qui comptera dans l’esprit du public. Entre temps, ils auront enlevé des munitions aux Démocrates et diminuer la force de l’enjeu que représente l’Iraq. Mieux encore, la position de McCain prouvera peut-être que sa prudence était justifiée.

Alors, qui sera le vainqueur du débat sur l’Iraq ? Incapable de trancher, je décide de chausser mes espadrilles et d’aller prendre une marche. I-pod à la ceinture, je suis déterminée à me changer les idées pendant une bonne heure. En longeant la 17e avenue, une dame qui arrosait ses fleurs m’arrête, et me demande si je connais quelque chose au jardinage. J’hésite et lui réponds : « oui, un peu ». « Est-ce une fleur sauvage ou une mauvaise herbe? » poursuit-elle. « Hum! Je crois qu’il s’agit d’une fleur, mais je n’en suis pas certaine. Je n’ai jamais vu cette plante auparavant, » lui dis-je. « Vraiment ! Dans ce cas, je vais lui laisser une chance de fleurir,» rajoute-elle. Sur le point de continuer mon chemin après cet échange courtois, je ne peux m’empêcher de me retourner et de lui demander à mon tour : « Vous avez suivi les nouvelles des derniers jours sur les développements en Iraq ? » « Oui, oui. Quel soulagement, nos enfants vont revenir au bercail ! », me dit-elle d’un air encouragé. Je ne lui ai pas demandé si elle était démocrate, républicaine ou indépendante ou encore, si la date d'un retour était importante. Soudainement, tout cela semblait secondaire.

Catherine Cano - Canovision

Monday, July 21, 2008

Un été américain: confidences de gens ordinaires 7*

Scranton, Pennsylvanie

Bill et Hillary sont des habitués de la place. Après tout, elle y a été baptisée et tant son père que son grand-père y ont travaillé. Chaque été, ils passent du temps en famille à leur chalet de Winola situé à 40 kilomètres de Scranton.

Au moment de la primaire de la Pennsylvanie en avril, Dollar Bill, dont le vrai nom est Bill Rosick, avait appelé le bureau de Mme Clinton pour offrir ses services comme chauffeur, mais sans succès.

Dollar Bill est tout un personnage. Il s’est installé seul dans un studio pas très grand, en banlieue de Scranton. Il ne voit jamais ses deux filles qui ont maintenant 16 et 21 ans. Il vit de chèque de paie en chèque de paie. Pour joindre les deux bouts, il travaille le jour dans un petit dépanneur et le soir, il circule dans les rues de la ville de Scranton avec son taxi. Dollar Bill passe son temps à parler avec les citoyens et il a une opinion sur tout. Il me raconte qu’il n’est pas le seul. Dans cette ville de mineurs, on parle peu aux étrangers, mais on n’hésite pas à exprimer ses idées en tête à tête..

Les gens qui prennent le taxi à Scranton sont des clients réguliers. Des personnes âgées qui ont besoin de se rendre à l’épicerie, à la pharmacie, chez le médecin ou à la banque. Le premier commentaire que Dollar Bill entend lorsqu’un passager entre dans son taxi, c’est une boutade sur le prix indiqué au compteur; le prix de base de $2.57 en janvier a grimpé à $3.00. Un voyage qui coûtait $10.00 en vaut maintenant 12 à14 dollars. Pour des gens qui gagnent peu, deux dollars de plus c’est beaucoup. « Le prix de l’essence n’arrête pas de monter, il faut bien que j’ajuste mon taux aussi. Sinon, je vais perdre trop d’argent et le taxi ne sera plus rentable », se plaint Dollar Bill. Pour des communautés comme celle de Scranton, les hausses continues de l’essence sont devenues un sérieux problème. « Les distances sont grandes et si vous ne vivez pas dans les grandes villes où il y a des services en commun, vous avez besoin de votre automobile pour vous déplacer. Les gens ici n’ont pas d’autres options, » conclut-il.

Les habitants de cette ville, située à un peu plus de deux heures au nord de Philadelphie, sont aussi préoccupés par les coûts élevés de la santé. On compte 47 millions d’Américains qui n’ont pas d’assurance santé. En Pennsylvanie, plus de 750,000 personnes vivent sans filet. Pour l’instant l’accessibilité aux soins de santé pour tous reste une promesse abstraite.

Il faut que les choses changent, pense-t-on, mais ici on ne croit pas aux contes de fée. Tous ce que l’on souhaite selon Dollar Bill, c’est que les choses changent pour le mieux ou tout au moins, reviennent comme avant, comme à l’époque de Bill Clinton.

Catherine Cano
(*7e et dernier article d'une série publiée dans la revue l'actualité - août 2008)

Un été américain: confidences de gens ordinaires 6*

Fallujah, Iraq

Shane est un marine parti en Iraq depuis le début d’avril. Les forces américaines dans ce pays en sont à leur sixième été. Depuis le début de cette guerre, plus de 4,000 soldats sont tombés au combat et près de 30,000 autres ont été blessés. Ce chiffre est encore plus alarmant parmi les Iraqiens civils et militaires où l’on compte plus de 50,000 morts et blessés.

À peine une semaine après son arrivée à Fallujah, quatre marines sont tués sur le coup lors d’une embuscade.

À des milliers de kilomètres de là, dans une ville de banlieue appelée Brighton au Colorado, la mère de Shane, Véronica, attend des nouvelles de sa belle-fille Maegan. Assise devant son ordinateur, cette dernière est encore à Camp Lejeune en Caroline du Nord avec le petit Matthew de 16 mois. Cela fait déjà trois jours que la nouvelle est rapportée dans les médias. Sans vouloir imaginer le pire, elle est incapable de dormir. Enfin, un courriel arrive. Maegan se précipite aussitôt au téléphone et signale le numéro de Véronica. Les nouvelles sont bonnes, et soulagées, elles pleurent toutes les deux de joie. Shane est vivant mais pour des raisons de sécurité, il faudra attendre trois semaines avant la prochaine communication.

« J’ai passé trois semaines angoissées, à me coucher sur le divan après le travail, le cœur en nœuds. Ce sont les plus longs mois de ma vie», me dit Véronica. Maegan s’est rapprochée de la famille et Véronica est si heureuse de retrouver son petit fils : « il ressemble à Shane lorsqu’il avait le même âge » me jure-t-elle. Shane n’a pas encore 21 ans et n’avait que 14 ans lorsque la tragédie du 11 septembre s’est produite en 2001. L’administration Bush n’a jamais prouvé le lien entre Al-Quaida et le régime de Saddam Hussein. Malgré tout, les États-Unis se sont engagés dans une guerre qui a déstabilisé l’échiquier politique du Moyen-Orient.

Shane croit à la nécessité de servir son pays. « Je veux contribuer à sécuriser les États-Unis, » dira-t-il juste avant de partir. Véronica le voit autrement: «Il est trop jeune pour comprendre qu’il met sa vie en danger pour une mauvaise décision de notre Président. Je prie tous les jours pour qu’il revienne en un morceau, physiquement et mentalement.»

Depuis, les téléphones de Shane se veulent encourageants, même s’il ne cache que les combats se sont intensifiés. Sous la chaleur torride, les conditions sont précaires: «nous restons conscients du danger qui nous entoure. Les temps de repos n’existent pas», confiera-t-il à sa mère.

Véronica non plus ne connaît plus le repos. « Tout ce que je peux faire, c’est de prétendre que tout va bien. » Et puis, elle sait qu’elle n’est pas la seule. Des dizaines de milliers de familles américaines vivent la même détresse. Chaque jour qu’un soldat tombe, elle bénit le ciel que ce ne soit pas son fils. Mais en même temps, un sentiment de culpabilité l’habite à la pensée que c’est une autre famille qui est en deuil et elle se demande à quoi sert tant de sacrifices.

Catherine Cano
(*6e article d’une série publiée dans la revue l’actualité – août 2008)

Sunday, July 20, 2008

Stratégie 101

Quelle fin de semaine! À en croire les nouvelles, Barack Obama doit être un candidat comblé. Le Président Bush a accepté de prendre la voie diplomatique pour discuter avec le gouvernement de l’Iran. Son attaché de presse refuse de dire qu’il s’agit d’un premier pas vers une négociation possible. Mais pour un Président qui condamnait l’intention d’Obama de s’asseoir avec des chefs d’État considérés comme des ennemis, la décision de vendredi de la Maison Blanche est un renversement de position.

Et puis le même jour, un autre développement important, cette fois en Iraq. Le Premier ministre iraquien Malaki se dit prêt à considérer une date pour le retrait des troupes américaines. Selon un journal allemand, il aurait même déclaré que le plan du candidat démocrate de rapatrier les soldats dans les premiers 16 premiers mois de son administration était plausible. Bush a admis qu’un retrait était envisageable, mais refuse toujours de consentir à un calendrier précis.

Il n’y a pas de coïncidences en politique. Georges Bush et Dick Cheney continuent de tenir les rênes du pouvoir. Devant un électorat désabusé, la tentative est simplement stratégique. Il ne faudrait pas être surpris de voir les négociations avec l’Iran échouer et le calendrier du retrait des troupes être limité à de vagues discussions. L’objectif est de faire la preuve que l’approche d’Obama n’est au mieux pas viable et au pire, dangereuse pour la sécurité du pays. Richard Bolton, ancien ambassadeur aux Nations Unies et grand défenseur du gouvernement Bush a laissé échapper la véritable stratégie républicaine en disant : « Les Américains auront eu un avant-goût d’un gouvernement Obama ».

Ces nouvelles sont plutôt bonnes pour John McCain qui en a bien besoin après avoir été obligé vendredi de remercier son co-président de campagne et expert économique, Phil Gramm deux semaines après que celui-ci ait déclaré que les Américains étaient des "pleurnichards" et se plaignaient à tort de la situation économique.

À la réflexion, Barack Obama qui compte profiter de ce voyage à l'étranger pour montrer une image de chef d'État et établir la crédibilité de ses positions sur les guerres en Iraq et en Afghanistan, n'a pas eu le temps d'atterrir que déjà, les stratèges républicains lui coupent l'herbe sous le pied.

Catherine Cano – Canovision

Un été américain: Confidences de gens ordinaires 5*

Atlanta, Georgia

Au quartier général des « Young Democrats for America », des dizaines de jeunes bénévoles sont à l’œuvre. Ils sont à organiser des petites assemblées de cuisine mieux connues sous le nom de « house Parties » où un (e) jeune invite une vingtaine de personnes à discuter de leurs préoccupations et de l’avenir du pays. Au loin, on entend la chanson « don’t stop thinking about tomorrow », de Fleetwood Mac.

Les primaires et les caucus qui se sont tenus dans les cinquante États américains ont enregistré des taux record de participation pour les jeunes de 30 ans et moins. Au total, cinquante millions d’entre eux seront en droit de voter aux élections de novembre. Encouragés par ces données, les jeunes ont pris d’assaut l’Internet et lancent des invitations à des pique-niques et des concerts dans les parcs. Ils créés des sessions de discussions appelées les « méga-meetings » sur Facebook et My Space. Ils se fabriquent même des personnages dans « Second life » pour s’assurer de ratisser le plus largement possible.

Dans moins de trois mois, Mijha se marie. Cette jeune noire américaine est avocate et présidente de l’organisation des jeunes démocrates d’Atlanta. Originaire de New York, elle a décidé de s’installer dans l’état républicain de la Georgie, parce qu’être démocrate à New York était trop facile. Mijha vit d’espoir pour son parti en novembre mais reste lucide. Les jeunes ont la réputation d’être apathiques et de ne pas se présenter aux urnes le jour du vote. «Mais cette fois, nous n’avons aucune excuse de manquer à notre devoir de citoyen. There is simply too much at stake, » me dit-elle avec détermination.

La situation économique des jeunes sera moins reluisante que celle de leurs parents. Avec un pays dont l’endettement est incommensurable, ils ne s’attendent pas à récolter des pensions de vieillesse et savent que les coûts de la santé augmenteront. Déjà, la recherche d’emplois sera plus difficile pour les gradués de 2008 selon Careerbuilder.com. Seulement 58 pourcent des employeurs prévoient engager de nouveaux gradués, alors que l’an dernier,on en comptait 79 pourcent. « Aurons-nous encore un emploi le mois prochain, aurons-nous les moyens d’acheter notre première maison et d’avoir des enfants, mais surtout, avec quelles valeurs les élèverons-nous ? » se demande Mijha.

C’est cette dernière question qui pousse les jeunes à s’exprimer. Mijha considère que cette élection va permettre aux États-Unis de revenir sur la bonne voie. Elle ajoute qu’il leur faut dire au reste du monde « we are back ». Fini l’arrogance, les ultimatum et la fabrication des faits. Elle croit qu’il y a un besoin urgent pour le peuple américain de s’unir pour surmonter les immenses problèmes auxquels il fait face. « Ma génération est colourblind et a grandi dans un environnement multiculturel », déclare-t-elle. «Les années Bush nous on montré que les politiques du pour ou contre nous, ne peuvent être que néfastes pour le pays.»

Mijha se souvient de la campagne présidentielle de 1992 lorsque Bill Clinton parlait d’espoir dans ses discours. La chanson de Fleetwood Mac lui revient en tête. C’est justement en pensant à demain qu’elle et des milliers de jeunes passent l’été à faire campagne.

Catherine Cano
(*Cinquième article d'une série publiée dans la revue l'actualité - août 08)

Saturday, July 19, 2008

Voyage à l'étranger d'Obama

Catherine en entrevue à l'émission "Montréal Maintenant" avec Esther Bégin, le 18 juillet
http://www.985fm.ca/mp3player.php?mp3=163703.mp3

Un été américain:Confidences de gens ordinaires 4*

Denver, Colorado

La beauté des montagnes rocheuses du Colorado nous fait parfois oublier l’immense nuage brun de pollution suspendu au-dessus de la ville de Denver, sa capitale. On estime que la moitié de cette pollution est le résultat de la circulation automobile ; et ce, même si le Colorado est le quatrième État au pays où les citoyens utilisent le plus leur vélo comme transport pour se rendre au travail.

Amoureux du grand air, les Coloradiens se réfugient en montagne pendant l’été. Mordus de l’exercice, vous les retrouverez en bicyclette, en camping, en canot, en rafting ou en escalade. Le Colorado est aussi l’État dont la population est la moins obèse de tous les États-Unis.

Dan Grunig ne fait pas exception. Un passioné du cyclisme, il enjambe tous les jours son vélo et parcourt en moyenne plus de 400 kilomètres par semaine. « J’ai toujours eu une bicyclette. Je me souviens que je devais faire sept kilomètres pour me rendre à l’école», me dit-il. En ouvrant la porte du condo qu’il partage avec sa compagne Suzanne, on réalise à quel point le sport fait parti de sa vie. Pas un, pas deux, mais quatre vélos sont juchés sur son mur à l’entrée.

En fait, ce cycliste de longue date est aussi directeur de « Bicycle Colorado », un organisme sans but lucratif dont l’objectif est d’accroître l’accessibilité des routes de l’État aux bicyclettes. « Il y a trois raisons pour lesquelles il est important d’encourager l’utilisation du vélo: améliorer notre état de santé, la qualité de notre environnement et nos infrastructures routières, » m’explique Dan. Il déplore le manque de planification du département des transports et prêche l’ajout de pistes cyclables à chaque nouvelle route construite. Selon lui, les bénéfices sont tangibles car une population qui vit dans un meilleur environnement et qui s’adonne à l’exercice, est forcément une population en meilleure santé. Et de plus, les épargnes que cette réalité représente, compensent pour les frais de construction encourus. « Il est difficile de comprendre pourquoi les gouvernements hésitent tant à investir », ajoute Dan.

Fan de l’exercice en montagne, Dan se prépare à la grande expédition qui se tient à chaque été dans les montagnes Rocheuses appelée « Ride the Rockies ». Plus de 2,000 citoyens se joignent à l’aventure et parcourent 900 kilomètres de bicyclette étalés sur une semaine. Le trajet permet aux participants de prendre conscience de leur environnement.

En cet été électoral, les bannières des partisans des deux camps politiques seront visibles sur le bord de la route et se mêleront aux encouragements de la foule tout au long du tour. Le Colorado est un État baromètre cette année et avec la Convention démocrate qui se tiendra dans sa capitale, on s’attend à beaucoup d’activités politiques. Il ne serait même pas surprenant de voir Barack Obama faire un bout de chemin avec les participants. John McCain pourrait y être aussi, mais vu son âge et ses blessures de guerre, personne ne s’attend à ce qu’il enfourche sa bicyclette.

Catherine Cano
(*Quatrième article d'une série puliée dans la revue l'actualité - août 08)

Friday, July 18, 2008

Un été américain: Confidences de gens ordinaires 3*

Iowa City - Iowa

Je n’avais jamais mis les pieds en Iowa. Mireille, ma grande amie de 30 ans habite Iowa City. Je m’y suis donc rendue au moment de la course à l’investiture démocrate, ce fameux caucus qui a propulsé la candidature de Barack Obama.

Iowa City est une ville universitaire en apparence tranquille mais où bouillonne idées et opinions politiques. Le « Hamburg Inn » est le centre nerveux et l’endroit rêvé pour tous ceux qui aiment jaser politique autour d’un bon café. C’est un petit restaurant, vieux de 60 ans, qui sert le déjeuner toute la journée, et qui se fait un point d’honneur, photographies à l’appui, de dire que depuis Ronald Reagan presque tous les candidats à la Présidence s’arrêtent ici. Dave, le propriétaire est plutôt fier de cette reconnaissance publique. Il prend chaque présidentielle au sérieux. « C’est important que les gens discutent, échangent leurs points de vue et surtout votent », affirme-t-il.

Pour inciter ses clients à comprendre l’importance de leur devoir civique, il a institué une élection parallèle pendant les caucus démocrates et républicains, appelé le « Coffee Bean Caucus ». Chaque client qui entrait dans son restaurant recevait un grain de café et devait choisir le pot associé à la, ou au candidat Républicain ou Démocrate de son choix. La veille du véritable vote, Dave organisait le dépouillement de centaines de grains de café et annonçait que Barack Obama remportait la nomination démocrate haut la main. Une prévision qui, le jour du vrai scrutin, s’est avérée juste.

Cet été, Dave a repris le concept de son concours en vue de l’élection de novembre. Il nomme sa campagne « Coffee Bean Ballot », et cette fois, les pots où vous pouvez déposer votre grain de café portent les noms de John McCain et de Barack Obama. Il prévoit un fort taux de participation. « Les Américains du Mid-ouest suivent cette campagne comme jamais. La situation économique des familles s’est envenimée au cours de la dernière année et on sent déjà les impacts», poursuit Dave. Il me donne en exemple la hausse du prix des aliments. Une cruche de 35 livres d’huile de soya produite en Iowa est passée de $30 à $45 en trois mois. « Et nous qui avons du mais frais qui poussent dans les champs à côté, on en offre moins au menu », concède-t-il. La diminution de la production du blé-d’inde, maintenant utilisé pour produire de l’éthanol, et l’augmentation de la demande font qu’il faut payer davantage pour la même douzaine.

Les hausses répétées des coûts des aliments l’ont obligé à refaire son menu et à augmenter le prix de ses plats. « On a remarqué une baisse de la clientèle, et ce qui est plus frappant, » me dit-il, « c’est que les clients laissent des pourboires moins généreux et ce sont les préposés aux tables qui en souffrent ».

Des centaines de restaurants à travers le pays imiteront l’idée de Dave et tiendront leur propre scrutin. Vous pouvez suivre les progrès et les choix de milliers de citoyens américains en vous rendant au site http://www.forkoveryourvote.com/.

Catherine Cano
(*Troisième d'une série publiée dans la revue l'actualité - août 2008)

Thursday, July 17, 2008

Un été américain: confidences de gens ordinaires 2*

Stonewall, Texas

Tamara est déjà en retard. Restée la veille à savourer les nouveaux crus, un « Claret 2006 » et un « Prairie Rotie » du style Rhones, elle n’a pas réussi à fermer boutique avant le début de la nuit. Tous les dimanches soirs, les derniers visiteurs et un groupe d’amis sont invités à prendre un dernier verre sur la terrasse du vignoble. Oui, vous avez bien lu : un vignoble au Texas, et pour être plus exact, il y a en a plus d’un. Le Texas Hill Country situé entre les villes d’Austin et de San Antonio, compte 23 jeunes vignobles. Cette région se targue d’être le nouveau Nappa Valley des États-Unis et pour cause, les vins sont simplement délicieux.

Tamara Wikel est une des artisanes responsables des dégustations du Becker Winery de Stonewall, célèbre pour être le vignoble de choix du Président Georges W. Bush dont le ranch à Crawford est non loin de là. Tamara sort fièrement la bouteille de Cabernet servi lors de la visite de Poutine à la Maison Blanche. Lorsque je lui demande quel est le vin préféré des Bush, elle hésite et fini par me montrer le « Viognier ». Un vin commandé à l’occasion du souper de départ de Karl Rove, le conseiller principal du Président, tant détesté. « Ce vin est aussi devenu populaire auprès de la population, mais on ne mentionne pas son origine», me dit-elle. À ma question si le vignoble produira une cuvée spéciale pour marquer le départ du Président, on me répond un « non » catégorique.

Juillet est le temps des vendanges et les 25 employés du vignoble, dont plus de la moitié sont mexicains, s’affairent aux préparatifs. Tamara me confie que l’immigration illégale faut l’objet de nombreuses discussions dans la région. Cette dernière, à l’instar du reste de l’état, voit sa communauté hispanique croître à une rapidité vertigineuse. Sans ces travailleurs, la plupart des vignobles seraient à court de main-d’œuvre. Mais le contexte économique précaire rend plusieurs citoyens inquiets de perdre leurs emplois aux mains d’étrangers.

Pour le moment, tout le monde se retrousse les manches. Dans un mois, la saison atteindra son apogée lorsque toute la région célèbrera le « Harvest Trail ». Tamara m’explique que c’est le moment, particulièrement pour les gens du coin, de faire la tournée des vignobles et de goûter aux nouveaux vins. Ironiquement, pendant le « Harvest Trail », le vignoble Becker organise une activité unique pour les passants : la foulée aux pieds du raisin. « Ce sera pour ceux qui ont besoin d’exprimer leur frustration, » me dira Tamara l’air moqueur. W. Bush ne fait pas l’unanimité ici. « Je respecte l’homme parce que personne n’aurait voulu être à sa place lors de la tragédie du 11 septembre 2001, mais depuis, il a manqué de diplomatie et aujourd’hui, je ne voterais pas pour lui ».

Même en terre républicaine, le départ de W. ne sera pas pleuré.

Catherine Cano -
(* Deuxième d'une série publiée dans la revue l'actualité - août 2008)

Wednesday, July 16, 2008

Un été américain : confidences de gens ordinaires 1 *

Los Gatos, Californie

À une centaine de kilomètres au sud de San Francisco se trouve une jolie petite ville de 36,000 habitants appelée Los Gatos. Oui, un drôle de nom qui signifie en français « Les chats » parce qu’à cet endroit vivaient des lynx il y a plus d’un siècle. Los Gatos, bondée d’artistes il y a trente ans, est aujourd’hui le lieu de résidence préféré des artisans de la Silicon Valley. Charmés dès le premier regard par ce coin paisible entouré de collines et de montagnes, Debbie et Dan Ross ont choisi de s’y établir avec leurs deux enfants.

En ce lundi d’été, il est 8 heures du matin et il fait déjà chaud. Tandis que le jeune Georges traîne dans son lit, Debbie tente d’encourager l’aîné, Sam, à manger avant le départ pour son camp d’été. Papa, un peu fatigué s’active aussi dans la cuisine. Il est percussionniste et a donné un spectacle de blues hier soir au bar JJs à San José, la ville voisine. Mais Dan a un autre boulot qui lui donne les « blues » ces jours-ci. Il est aussi courtier immobilier et par les temps qui courent, il a besoin de prendre les bouchées doubles. Entre les ravages causés par des températures extrêmes et la crise immobilière, l’année a été difficile en Californie. Leurs voisins, incapables de rencontrer leurs obligations financières, se voient forcer de vendre leur maison à perte. Cette dégringolade est sujet d’inquiétude pour Dan dont le travail est au cœur même de cette crise.

Et puis, la situation économique du pays n’est pas rassurante. « Nos enfants iront à l’Université et les frais de scolarité sont exorbitants aux États-Unis. Il nous faut amasser près de $200,000 par enfant d’ici 12 ans », me confient Debbie et Dan. Même Debbie, qui s’était permis de rester à la maison pour s’occuper des garçons, devra retourner enseigner le pilotage.

Les Ross suivent l’élection présidentielle avec passion mais ils ont peu de discussions avec les gens de leur entourage. « Nous vivons une récession et nous sommes en guerre. Nous allons à la partie de soccer de notre fils et personne ne parle de rien, comme si tout allait bien », de dire Dan. Ils sont surpris de constater que la population ne se soulève pas davantage et qu’il n’y ait pas plus de manifestations dans les rues.

Dan et Debbie sont visiblement inquiets. Ils ont un réel besoin de savoir quelles solutions les candidats à la présidence apporteront pour sortir l’économie de son marasme. Avec neuf trillions de dettes et plus de cinq cents milliards de déficit, les priorités doivent changer de façon draconienne pensent-ils. Dan, jusqu’à ce jour républicain a pris une décision : suivre Barack Obama qui semble être en mesure de réaliser ce changement impératif.

Le petit Georges encore endormi fait son entrée dans la cuisine. « Oups, assez parlé de politique, il est déjà 9 heures, » s’écrie Debbie ! C’est le temps pour Georges et Sam de quitter la maison pour leur journée au camp d’été.

Catherine Cano -
(* Premier d'une série publiée dans la revue l'actualité - août 2008)

Tuesday, July 15, 2008

Des temps durs!

La dernière déclaration du Président sortant, Georges W. Bush, ne suffira pas à rassurer la population face à la dégringolade de l’économie. « Je ne suis pas un économiste… je suis un optimiste », a-t-il dit en conférence de presse ce matin.

Près d’un demi million d’Américains ont perdu leur emploi depuis janvier et le prix des maisons a baissé de 15%. Selon le président de la réserve fédéral, Ben Bernanke, l’économie américaine fait face à de grandes difficultés qui ne seront pas résorbées d’ici la fin de l’année. La crise immobilière, la montée des prix du pétrole - provoquant un coût élevé de l’essence et de la nourriture - et la situation précaire des marchés boursiers et des institutions financières enrichissent l’inquiétude de la majorité des économistes.

Or, l’économie est devenue la préoccupation principale des citoyens américains. L’intention de Barack Obama de mettre fin à la guerre en Iraq n’est pas étrangère aux coûts exorbitants qu'entraîne cette guerre pour le pays; coûts évalués à 10 milliards de dollars par mois selon certains estimés. John McCain quant à lui ne promet pas de ramener les troupes américaines à une date précise. De fait, il considère plutôt que le pays devra demeurer en Iraq aussi longtemps que cela sera nécessaire.

Les États-Unis risquent non seulement de continuer à payer pour la guerre en Iraq, mais le pays devra aussi se préparer à investir des sommes considérables pour la lutte contre les Talibans et Al-Quaida en Afghanistan. Les discours prononcés aujourd’hui par les deux candidats à la présidence sont clairs : Barack Obama a annoncé son projet de redéployer et d’accroître le nombre de troupes américaines en Afghanistan. Il considère que la lutte pour éliminer l’ennemi dans ce pays constituera la nouvelle priorité de son administration. John McCain commence également à reconnaître la nécessité de consolider les effectifs dans cette région.

Jusqu'à présent, les Américains sont de surprenants joueurs. Malgré leur opposition à la guerre en Iraq, la moitié de la population soutient la stratégie du candidat républicain John McCain qui consiste à ne pas retirer rapidement les troupes américaines du territoire iraquien. Étonnant vous me direz ! Mais à bien y songer, les citoyens réalisent qu’un retrait rapide semble de moins en moins probable, la crise dépassant largement l’Iraq, et que la lutte contre le terrorisme ne fait que commencer.

Son opposition à la guerre en Iraq, a permis au Sénateur Obama de gagner des points importants contre Hillary Clinton tout au long de la saison des primaires. Il reste que cet enjeu lui échappe face à un candidat qui a une longue expérience militaire. Encore aujourd’hui dans un sondage du Washington Post et du réseau ABC, 72% des Américains croient que John McCain ferait un meilleur commandant en chef. Pour freiner cette perception et récupérer l'appui du public sur sa politique étrangère, Obama se rendra en Iraq et en Afghanistan la semaine prochaine.

Les attaques fusent déjà entre les deux camps. McCain accusant Obama de déterminer sa stratégie avant même d’être allé en Iraq et en Afghanistan. Et Obama rétorquant que ce n’est pas le nombre d’étampes dans son passeport qui compte, mais son bon jugement.

Le danger d’une campagne électorale est de mettre l’emphase de la couverture médiatique sur la rhétorique plutôt que sur les faits. John McCain peut bien promettre qu’il mettra la main sur Osama Bin Laden et qu’il mettra fin à la guerre en Afghanistan. Et Obama peut toujours prétendre que les troupes américaines seront de retour d’Iraq d’ici 16 mois. Les Américains se retrouvent prisonniers dans un coûteux bourbier, peu importe qui sera le prochain Président des États-Unis.

Si la crise économique s'aggrave déjà, les ramifications de la guerre en Iraq ne laissent rien présager de bon. Le pays n'a pas les moyens de s'endetter davantage. Tout comme W. Bush, je ne suis pas économiste, mais contrairement au Président, je suis loin d'être optimiste.

Catherine Cano- Canovision